Surexploitation de la nappe phréatique par les grands agriculteurs : 17.000 points d’eau dans le Souss, dont 14.500 non autorisés, 260 millions de m3 de déficit !!
Depuis près de trois semaines et par des températures record atteignant jusqu’à 51° à l’ombre, la ville de Taroudant connaît une pénurie d’eau. De fait, l’alimentation de la ville en eau potable est assurée uniquement par les ressources souterraines.
Or, la surexploitation, légale ou illégale, de ces mêmes ressources par les grands exploitants agricoles de la région, a engendré une baisse du niveau piézométrique (environ 2m/an) de la nappe phréatique située juste en dessous de la ville.
Par conséquent, la productivité des installations d’eau potable a connu une forte chute: le débit exploité par l’Office national de l’eau potable (Onep) est passé de 8.470 m3/jour à 6.740 m3/jour.
Afin de redresser la situation, un programme quotidien d’approvisionnement en eau potable a été instauré conjointement avec les autorités locales et la Commune urbaine de la ville. Il consiste à desservir de manière équitable et à tour de rôle les différents quartiers de la ville.
Néanmoins, des quartiers comme Hita, Sidi Belkas, Oulad Bensouna, Zraibe, Oulad Bounouna, Mich… continuent de souffrir. Ils ne reçoivent l’eau courante que deux à trois heures par jour pour ceux qui habitent au rez-de-chaussée ou au premier étage.
Ceux qui résident au deuxième ou troisième étages ne la reçoivent tout simplement pas. «Chez moi, la coupure d’eau courante dure depuis vingt jours. Quand je me suis plaint, on m’a répondu qu’il n’y avait pas assez de pression pour faire monter l’eau jusqu’au troisième», déclare ce jeune policier qui a dû finalement déménager vers un quartier où la desserte fonctionne une partie de la matinée.
Devant l’urgence de la situation, l’Onep va équiper et mettre en service un nouveau forage d’un débit de 8 litres/seconde opérationnel avant fin août 2009. Deux autres forages profonds dont l’implantation est imminente seront mis en service durant l’été 2010.
Par ailleurs, des campagnes de recherche et réparation des fuites seront soutenues afin d’éviter toute perte d’eau au niveau du réseau de distribution.
A long terme et à partir de 2012/2013, une étude du schéma directeur d’alimentation de la province de Taroudant réalisée par l’Onep prévoit la réalisation d’une station de traitement pour un débit de 300 l/s d’eau traitée à partir des eaux de surface.
Notamment celles des barrages Aoulouz et Sidi Abdallah pour renforcer et sécuriser la desserte de la ville et son rural. La province de Taroudant a aussi été sollicitée pour créer un comité de vigilance contre le gaspillage de l’eau, remplissage de piscine par période de chaleur.
Pour la région Souss Massa Draâ, la problématique hydrique est un défi majeur. La surexploitation de la nappe phréatique au-delà de ses capacités de recharge par les grands agriculteurs a causé un déficit de 260 millions de m3. Un déficit qu’il s’agit d’abord de stopper puis de combler.
L’objectif de cette région est donc de mettre en place une stratégie régionale de développement de ses ressources hydriques, de généraliser le système du goutte-à-goutte et de valoriser l’eau d’irrigation en utilisant des cultures moins exigeantes en eau et plus rentables. Le coût global de l’opération est de 900 millions de DH pour la période 2008/2015.
Pour Mhamed El Fasskaoui, secrétaire général de l’Agence du bassin hydraulique du Souss Massa Draâ, la prise de conscience et l’engagement de tous les partenaires publics et privés concernés par la problématique de l’eau est nécessaire pour la réussite d’un projet de cette envergure.
Il s’agit aussi de limiter l’extension de nouvelles superficies irriguées et d’interdire formellement de nouveaux creusements à moins d’une autorisation remise après étude.
Actuellement, sur 17.000 points d’eau tous usages confondus, seulement 3.500 sont autorisés.
En attendant, Taroudant gère sa pénurie, mais les habitants, minés par un sentiment d’injustice, se préparent à organiser des sit-in. «Nous payons régulièrement nos factures, dit ce fonctionnaire, nous sommes donc en droit, en tant que citoyens d’attendre un service correct en retour».
Source : l'Economiste