La Méditterranée est en danger. Pourquoi pas une gouvernance
commune en matière de deloppement durable dans les 22 pays riverains, et un
développement massif des énergies renouvelables ?
Interview de Christian Estrosi, député-maire de la ville de Nice et président du réseau des villes Euromed
Le Comité économique et social européen s'est récemment interrogé, à
l’occasion d’un colloque (*) sur les moyens de relever les défis du
développement durable de la Mediterranée et des pays qui l’entourent.
La
question est légitime. La Méditerranée est un héritage commun à l’ensemble des
peuples qui vivent dans cet espace unique et exceptionnel, carrefour des peuples
et des civilisations.
Ce patrimoine appelle de notre part à l’évidence une
gestion, une gouvernance communes.
En tant que président du Réseau des villes Euromed, j’ai proposé quatre actions
principales, touchant aux questions de l’énergie, de la gestion de l’eau et de
l’environnement.
1) Energies renouvelables : j’ai appelé la communauté
européenne à financer et à accompagner l’objectif de production
d’énergie renouvelable dans les pays du Sud de la Méditerranée dans les mêmes
proportions que celles retenues sur le territoire européen, à savoir
20% de la part des énergies renouvelables dans la consommation.
Le soleil
et la mer offrent des réservoirs considérables pour le développement de telles
énergies.
Les fermes solaires des déserts et l’installation de cellules
photovoltaïques sur les toits, les pompes à chaleur marines ou l’utilisation de
la biomasse, sans compter les potentiels hydro-électriques des montagnes
méditerranéennes sont quelques uns des développements qui permettront
d’atteindre un tel objectif.
2) L’accès à l’eau et aux services publics
durables : autour de la Méditerranée, 30 millions de personnes n’ont pas accès à
l’eau potable et 70% des effluents sont déversés en mer, non traités ! Ce n’est
plus supportable.
Et pourtant le 5e Forum mondial de l'eau qui s’est tenu à
Istanbul n’a pas osé déclarer l’eau « un droit de l’Humanité » !
Nous devons,
nous, avoir cette audace. Mais c’est évident qu’il faut aller encore plus loin
et ne pas hésiter un seul instant à déclarer comme un droit de l’Humanité
l’accès à tous les services publics durables qu’il s’agisse de l’eau, de la
gestion des déchets, de l’assainissement ou encore des transports en
commun.
3) Un conservatoire du littoral euro-méditerranéen : les 22 pays
qui bordent la Méditerranée sont aussi peuplés que les Etats-Unis, le Canada et
le Mexique réunis.
Un tiers de cette population habite sur la Côte. 200 millions
de touristes par an sont accueillis sur la première destination touristique au
monde.
Il nous faut donc absolument gérer les zones côtières méditerranéennes.
Pour ce faire, créons un conservatoire du littoral
euro-méditerranéen, une structure qui agira pour le compte des Etats membres, en
respectant la législation de chaque pays et en mettant en place une gestion
contractuelle des espaces côtiers protégés.
4) Une police de haute mer :
les centaines de milliers de tonnes de fuel dégazés chaque année, l’incapacité
de protéger le thon rouge, démontrent l’urgence qui s’attache à mettre fin à
cette zone de non droit.
Pour que le principe pollueur payeur puisse trouver à
s’appliquer, il faut que nous sollicitions par l’entremise de nos gouvernements
respectifs l’Organisation des Nations Unies afin que les pays riverains de la
Méditerranée soient autorisés à mutualiser leurs moyens dans le but de créer la
police de la haute mer en Méditerranée.
S’il a été possible d’obtenir un mandat
de l’ONU pour protéger le transit du commerce dans le Golfe d’Aden, il ne
devrait pas être trop difficile a priori d’obtenir un mandat pour empêcher la
Méditerranée de mourir !
Nous pouvons ainsi inventer tout autour de la
Méditerranée un modèle original qui nous est propre, adapté à nos singularités
méditerranéennes multiples.
Ce concept c’est celui de « ville méditerranéenne
durable » que je m’efforce de mettre en application à Nice et sur tout le
territoire de la Côte d’Azur.
La réalisation dans la plaine du Var de
l’opération d’intérêt national Ecovallée créera un territoire de référence en
même temps qu’un laboratoire de tout ce qui se fait de mieux en matière
d’environnement.
Source : Energie.l'Expansion