Soutien «illimité» à l'agriculture et relance des entreprises publiques qui «disposent d'un marché et de capacités de production».
Tels sont les engagements faits par le Premier ministre, Ahmed Ouyahia,
dans sa réponse aux interrogations des membres du Conseil de la nation.
Cette insistance sur le soutien aux secteurs économiques «stratégiques»
a, comme pour toile de fond, une déception évidente à l'égard des
investissements extérieurs et une franche inquiétude au sujet de
l'accroissement de la facture d'importations qui avoisine les 40
milliards de dollars en 2008 contre 13 milliards quatre ans plus tôt.
Le Premier ministre veut traduire en acte le constat d'échec de la
politique d'investissement établi il y a une année par le président de
la République. Il constate que les opérateurs étrangers ont pris le
contrôle du marché national et que cela a entraîné un affaiblissement
conséquent de l'industrie locale.
Une attention particulière devrait être accordée au groupe Saidal
pour l'industrie pharmaceutique et au secteur de l'industrie mécanique,
le complexe de construction de moissonneuses-batteuses. «Il est temps
de booster les entreprises publiques qui disposent d'un marché et de capacités de production»,
a-t-il dit. A l'évidence, cela ne devrait pas être difficile.
Le gros
des marchés pour les entreprises publiques reste l'Etat lui-même. Des
entreprises publiques, si elles ne sont pas totalement démantelées,
peuvent effectivement être boostées si l'Etat devient moins soucieux de
délais dans la réalisation de son programme d'investissement public.
Cela a été l'objet principal de rancoeur pour le précédent plan.
Relancer les entreprises algériennes, publiques ou privées, exige
effectivement un changement de modèle économique pour le programme
d'investissement public.
Si au bout de 150 nouveaux milliards de dollars d'investissements, on
n'a pas réussi à avoir des entreprises algériennes viables, difficile
de dire qu'on n'en connaît pas la cause... Abdelhamid Temmar, ministre
de l'Industrie et de la Promotion des investissements, a indiqué que
les études de remise à niveau des entreprises publiques «encore viables
et disposant de marché» sont déjà prêtes et qu'une réunion du
gouvernement devrait finaliser le dossier et arrêter la liste des
entreprises qui seront concernées par l'opération de soutien que l'Etat
compte leur apporter afin de les conforter et d'améliorer leurs
performances. L'aide de l'Etat ira à «tous les secteurs essentiels à
l'économie nationale», a-t-il indiqué en citant les secteurs de
l'industrie mécanique, de la pétrochimie, de la pharmacie, du bâtiment
et des travaux publics. Situant les enjeux dans l'emploi et la sécurité
alimentaire, le Premier ministre a annoncé qu'outre les crédits sans
intérêts accordés aux agriculteurs, l'Etat est disposé à mettre
davantage la main dans le Trésor public pour accroître son soutien.
«Contraindre» les investisseurs à s'éloigner d'Alger, Oran, Annaba... ?
Après l'imposition d'une majorité de 51% de parts détenus par les
Algériens dans tout projet d'investissement et l'obligation aux
sociétés commerciales étrangères de céder 30% de parts aux Algériens
avant le 31 décembre 2009, le gouvernement pourrait prendre une
nouvelle mesure contraignante afin de pousser les investisseurs à aller
loin des grands centres urbains du pays.
Ahmed Ouyahia a ainsi évoqué
la possibilité de retirer les avantages liés à l'investissement dans
les grandes wilayas comme Alger, Oran et Annaba, qu'il juge «saturées»
de projets.
«La concentration des investissements dans les grandes
wilayas pourrait nous inciter à retirer tout soutien ou encouragement
en faveur des projets d'investissement dans les wilayas ayant bénéficié
d'un grand nombre de ces projets», a indiqué M. Ouyahia en soulignant
que le gouvernement est «en mesure de prendre cette décision et mettre
fin à toute mesure incitative dans certaines wilayas».
Pressentant les critiques qui ne manqueront pas de s'exprimer sur ce
sujet, Ahmed Ouyahia souhaite que les opérateurs économiques soient
sensibilisés à la nécessité d'investir dans les régions éloignées qui
ont besoin de développement pour lutter contre le chômage et l'exode
rural.
Les critiques ne manqueront pas de relever que c'est toute une
politique d'aménagement du territoire qu'il faut mener et qu'Alger,
Oran ou Annaba ne sont pas dans une situation de «plein emploi» pour
que l'on parle de saturation.
Pourquoi retirer de manière régalienne
les avantages à l'investissement dans ces wilayas où l'on a autant
besoin de créer des emplois qu'à l'intérieur du pays ? La solution
«économique» et non pas administrative serait plutôt de stimuler
l'investissement dans les régions éloignées en leur accordant plus
d'avantages que ceux qui s'installent autour des grandes villes.
Ce ne serait que justice puisque ceux qui investissent dans les régions
éloignées auront plus de contraintes car ne bénéficiant pas des
infrastructures disponibles dans les grandes villes.
Il est plus
logique, comme l'évoque d'ailleurs le Premier ministre, de songer à des
mesures incitatives additionnelles pour soutenir l'investissement dans
les zones que l'on veut développer plutôt que d'en supprimer pour ceux
qui s'établissent autour des grandes villes.
Si le but est une
substitution aux importations, il faut encourager et non dissuader.
Cela n'exclut pas - et c'est même souhaitable - que les avantages
consentis pour les investissements réalisés dans les zones éloignées
soient plus substantiels.
Source : ContinentalNews