43 laboratoires, un taux de couverture des besoins locaux en médicaments de 49% aujourd’hui, contre 7% seulement en 1987, un stock d’investissements passé de 6 millions à 450 millions de dinars, etc.
Ces chiffres égrenés par M. Mondher Zenaïdi, ministre de la Santé, à l’ouverture du séminaire de présentation des «mesures présidentielles» visant le développement de l'industrie pharmaceutique, démontrent clairement que ce secteur a fait un grand bond en avant au cours des deux dernières décennies, qui lui a permis d’atteindre «un niveau technologique très élevé qui a contribué à attirer d’importants investissements nationaux et étrangers et à créer des milliers d’emplois».
A la recherche de vecteurs capables de permettre au pays d’accélérer son taux de croissance économique et le rythme de création d’emplois, et, souligne M. Zenaïdi, de garantir sa «sécurité sanitaire», les pouvoirs publics ne pouvaient pas ne pas penser à continuer de miser sur l’industrie pharmaceutique.
Mais pour que cette locomotive puisse atteindre les ambitieux objectifs fixés –porter le taux de couverture des besoins locaux à 60%, le chiffre d’affaires du secteur de 360 millions de dinars en 2009 à 730 millions de dinars en 2016, multiplier les exportations par cinq à 160 millions de dinars-, il est nécessaire de «revoir certains aspects qui entravent le développement du secteur», note M. Afif Chelbi.
Le ministre de l’Industrie, de l’Energie et des Petites et Moyennes Entreprises (MIEPME) en a au moins deux à l’esprit : la suspension du «système de corrélation» et la politique des prix.
Pendant longtemps baptisé «système de compensation» puis «système de corrélation», ce dispositif, imaginé par le gouvernement afin d’obtenir la contribution des grandes firmes automobiles au développement d’une industrie des composants en contrepartie de leur accès au marché tunisien, a été également utilisé en faveur de l’industrie pharmaceutique jusqu’en 2007.
Depuis, «on a cessé d’applique la règle de la corrélation au motif que ce n’est pas permis par l’Organisation mondiale du commerce», explique Mme Noura Laroussi, directrice générale de l’Industrie au MIEPME. Et cet «arrêt de la compensation automatique des importations par une production locale a entraîné une baisse de 25% du nombre des autorisations de mise sur le marché (AMM) pour les médicaments locaux», constate M. Afif Chelbi.
Raison pour laquelle il a été décidé de rétablir ce dispositif «de manière intelligente et acceptable par tous», annonce le ministre. La solution imaginée -pour éviter d’éventuels problèmes notamment avec l’OMC- consiste à «lancer des appels d’offres internationaux seulement pour médicaments non fabriqués localement et à approvisionner le marché avec des médicaments locaux à chaque fois qu’ils sont disponibles avec la quantité et la manière requise et conformément aux procédures légales en vigueur».
Toutefois, les autorités n’entendent pas se limiter à revenir à la situation ante. En effet, le gouvernement compte négocier l’extension de l’application du «système de corrélation» aux laboratoires qui n’y sont pas encore soumis.
Pour cela, une règle très claire a déjà été énoncée qui veut que ce système s’applique aux firmes étrangères réalisant en Tunisie un chiffre d’affaires de 10 millions de dinars pendant trois années successives.
Or, sur les dix laboratoires qui se trouvent dans cette situation, «seuls quatre ont investi dans le pays», observe M. Kamel Idir, patron de la Direction de la Pharmacie et du Médicament au ministère de la Santé publique.
Deuxième entrave au développement de l’industrie pharmaceutique nationale, la politique des prix. Celle-ci se traduisait par «un gel des prix pour des périodes dépassant parfois les cinq années, et servait les intérêts des laboratoires étrangers au détriment des nationaux», admet M. Afif Chelbi.
Cet effet négatif a été par exemple observé au niveau des équilibres financiers de la Pharmacie Centrale qui finance une compensation de 41 millions de dinars «qui profite essentiellement aux laboratoires étrangers, dont en particulier 4,4 MDT qui vont à des médicaments importés ayant un équivalent fabriqué localement –ce qui constitue une concurrence déloyale de l’industrie pharmaceutique locale», tranche le ministre.
De même, poursuit M. Chelbi, cette méthode «n’encourage pas les étrangers à investir en Tunisie et entrave les nouveaux projets nationaux, en particulier ceux nécessitant d’importants investissements».
Pour toutes ces raisons, on s’achemine vers une révision de cette politique des prix qui sera opérée par une «commission unifiée ad hoc» qui devra «étudier et proposer des prix selon le genre de médicaments et encourager la consommation des génériques afin de rationaliser les dépenses».
Un vaste et difficile chantier qui va nécessiter beaucoup d’engagement, de détermination et de … diplomatie.
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