Les Guinéens, qui attendent chaque année avec impatience la saison hivernale,
entre juin et septembre, propice depuis quelques années à une bonne desserte du
courant électrique tous les soirs de 18 heures au petit matin, ne s'expliquent
pas encore la pénurie de ce qui est considéré comme une denrée rare dans le
pays.
La société Energie de Guinée (EDG), dont les installations sont
vétustes et qui est vue comme "un gouffre financier", n'arrivant pas à faire de
bonnes recettes à cause de "la mauvaise gestion", reste de marbre, ne
fournissant aucune explication sur la rareté de son produit depuis plusieurs
décennies.
Les pouvoirs publics estiment que l'une des solutions à la bonne desserte du
pays reste la privatisation de la société. La possibilité hydroélectrique du
pays était estimée à quelque 6.400 MW il y a une décennie. Le réseau électrique
couvre moins de 10% du territoire national et moins de 10% des 8 millions de
Guinéens n'ont pas accès à l'électricité.
En dépit de toutes ces
difficultés, les spécialistes estiment que le pays regorge d'une importante
réserve en énergie éolienne et un potentiel de gisement solaire qui peut être
une panacée pour la pénurie du courant sous certaines conditions.
Selon
Saïdou Diallo, Ingénieur, chargé du Projet électrification rurale décentralisée
(PERD), le solaire est une énergie propre, écologique qui ne subit aucune
pression sur l'environnement. La durée de vie d'un panneau solaire varie entre
15 et 25 ans. L'énergie stockée peut être utilisée à tout moment.
Les
Energies nouvelles et renouvelables (ENR), explique-t-il, regroupent plusieurs
sources potentielles d'énergies tels que le solaire, l'éolien, les diverses
formes de biomasses (résidus agricoles et agro-industriels, les déchets de
l'industrie du bois et animaux), le biogaz, entre autre, qui existent tous en
Guinée.
"La diversification des ENR et leur dispersion sur l'ensemble du
territoire national rendent très difficile le développement de ces formes
d'énergie. Il faut réaliser de nombreux projets de petites tailles utilisant des
technologies appropriées pour avoir un impact significatif sur le bilan
énergétique", a expliqué le chargé du PERD.
L'irradiation annuelle
moyenne, souligne-t-il, est estimée à 4,8 kwh/m2jour. La durée annuelle moyenne
des heures d'ensoleillement varie entre 2.000 heures à Conakry et 2.700 heures à
Kankan, en Haute Guinée. "Ces chiffres prouvent à suffisance que le solaire est
important en Guinée".
Les vitesses moyennes annuelles des vents observés
en Guinée maritime et en Moyenne Guinée sont comprises entre 2 et 4 m/s. Les
sites susceptibles d'être équipés en éolienne sont les îles, les zones
côtières.
Tous les projets réalisés dans le domaine des ENR, précise le
patron du PERD, l'ont été entre 1980 et 2002. "La photovoltaïque est
incontestablement le programme le mieux réussi en raison de l'importance du parc
photovoltaïque et de l'expérience acquise".
Le secteur de la Santé vient
en tête des installations avec comme priorité l'éclairage et la réfrigération
des centres de Santé et des hôpitaux préfectoraux. Il existe plus de 350 centres
de Santé ou dispensaires et une centaine d'hôpitaux en Guinée où le plus grand
nombre est situé en milieu rural et dépourvu d'énergie électrique et d'eau
courante.
L'éclairage des salles de soins nocturnes pour les diverses
interventions dans ces localités se fait à l'aide des lampes à pétrole. Les
besoins en électricité des centres de Santé et le dimensionnement d'un
générateur solaire photovoltaïque sont définis par l'importance des fréquences
(forte, moyenne ou faible) et comprises entre 200 et 800 Wh/j.
Un seul
module de 55 Wc, qui coûtait près de 5.000 dollars US en 2000, permet de
desservir les besoins en éclairage d'un centre de Santé rural de faible
importance, tandis qu'il faut 5 modules de 55 Wc pour couvrir les besoins d'un
centre de Santé amélioré situé en périphérie d'une agglomération.
"Un
seul panneau solaire de 55 wc permet d'assurer le fonctionnement de 3 lampes
fluo compactes ou de réglettes fluos 4 heures le soir. Si l'on rajoute des
utilisations de matériel vidéo et audio, il faudra au minimum 3 panneaux
solaires de 55 wc", explique M. Diallo.
Les besoins en eau sont assurés
par des pompes à motricité humaine (manuelle ou pédestre) situées à l'extérieur
du centre de Santé ou souvent éloignées. Les pompes à courant continu sont
alimentées en courant électrique à partir d'une batterie rechargée à l'aide d'un
ou plusieurs panneaux solaires. Un régulateur contrôle la charge et la décharge
de la batterie.
L'eau pompée pendant les 6 à 8 heures d'ensoleillement
quotidien est stockée dans un réservoir surélevé pour desservir les
utilisations.
En Guinée, seuls quelques particuliers nantis procèdent à
l'installation du solaire à domicile. Selon M. Amadou Diallo, commerçant, son
dispositif, qui a coûté 2.500 dollars US, lui assure l'éclairage du domicile
avec une dizaine d'ampoules, le réfrigérateur, la télévision, le climatiseur,
entre autre pendant 8 heures. Les batteries sont rechargées automatiquement au
retour du courant électrique sur le réseau.
Le patron du PERD reconnaît
que le coût du solaire n'est pas accessible à tous. Ainsi, il plaide pour une
défiscalisation des équipements comme c'est le cas au Comité inter-Etats de
lutte contre la sécheresse au Sahel (CILSS) qui a mis en place une politique
commune de vulgarisation de l'énergie solaire dans 9 des pays membres qui
baissent les impôts sur les équipements importés.
Outre le coût
particulièrement élevé de l'investissement photovoltaïque pour une modeste
famille, le PERD considère que l'absence d'un environnement technologique en
zone rurale fait peser un risque sur la pérennité de
l'électrification.
Dans le cadre d'un programme pluriannuel mis en place
par le gouvernement et la Banque mondiale, deux préfectures de la Moyenne
Guinée, soit 1.000 ménages, seront dotées prochainement de solaire pour environ
1 milliard de Francs guinéens (1 dollar US = 4.800 FG). Les pouvoirs publics
souhaitent privilégier la solution du solaire qui reste "celle de l'avenir".
Source : Afriquenligne