L’Europe veut se rendre moins dépendante des hydrocarbures grâce aux gisements de soleil de l’autre côté de la Méditerranée.
L’Europe veut profiter du lancement de l’Union pour la Méditerranée (UPM) pour promouvoir un projet longuement discuté à Bruxelles, celui de mettre en oeuvre un plan sur l’énergie solaire.
La Commission européenne, qui a élaboré la déclaration adoptée à Paris par les 44 chefs d’Etat au sommet fondateur de l’UPM du 13 juillet 2008, a invité le futur secrétariat de ce nouvel ensemble à « explorer la faisabilité de développer un plan méditerranéen d’énergie solaire ».
La raison y est clairement expliquée : « L’actuelle dépendance du pétrole et du gaz comme sources d’énergie est porteuse de beaucoup de risques avec la réduction de la production dans un future proche ». Cette préoccupation sur la diversification des sources d’énergie paraît plus présente au nord qu’au sud.
Depuis la grave crise de l’hiver 2005 entre la Russie et l’Ukraine sur la fourniture en gaz, la sécurité énergétique est devenue une priorité partagée par tous les membres de l’Union européenne (UE). L’UE a tracé un programme sur les énergies renouvelables s’étalant jusqu’à 2020, avec pour perspective de réduire les gaz à effet de serre.
Un plan est également tracé pour le développement des biocarburants.
Les gisements solaires du sud intéressent le nord
Le plan solaire de l’UPM est donc inscrit dans une logique claire qui ne doit rien au hasard. Selon l’agence spatiale allemande, l’Algérie possède le plus grand gisement solaire de la région : 169,44 térawatts heure/an (TWH/an) pour le solaire thermique et 13,9 TWH/an pour le solaire photovoltaïque.
Le Maroc a aussi un grand potentiel : 30% du territoire reçoit chaque année plus de 2000 kWh par m2 d’ensoleillement.
Des villages au sud du Maroc sont électrifiés grâce à l’énergie solaire (ce qui évite un raccordement à un réseau national). La Tunisie a tracé un programme d’installation de 55 000 m2 de capteurs solaires, des chauffe-eau solaires et des systèmes de climatisation.
Selon les experts, le solaire thermique connaît un grand essor actuellement. D’où l’intérêt des entreprises qui maîtrisent le processus technologique de fabrication du matériel.
A titre d’exemple, le Français Giordano, qui produit les capteurs thermiques, s’est bien installé en Tunisie.
La volonté de l’Algérie et de l’Egypte de construire des centrales électriques hybrides gaz/solaire a mis en concurrence plusieurs grandes entreprises européennes et américaines.
L’Algérie a lancé les travaux de construction d’une centrale hybride d’une capacité de 180 megawatts à Hassi Rmel (sud) qui utilisera des panneaux solaires de 100 mètres étalés sur une superficie de 18 hectares. Le coût de l’investissement est de 150 millions de dollars.
Trois autres centrales sont programmées. L’Algérie a l’ambition de produire 5% de son électricité à partir de l’énergie solaire d’ici à 2015, et d’en exporter une partie vers l’Italie, l’Espagne et l’Allemagne.
Un câble de 3000 km pour l’électricité solaire
L’Algérie et l’Allemagne ont signé, début 2008, un accord de coopération pour développer l’énergie solaire et étudier la possibilité de produire de l’hydrogène à partir de cette énergie ainsi que des piles à combustible.
La ville allemande d’Aachen devra être reliée à la ville algérienne d’Adrar par un câble de 3000 km qui transportera de l’électricité solaire. Baptisé « clean power from desert », le projet, qui est estimé à 2 milliards d’euros, attend des financements. L’exploitation du câble, dont le produit est durable autant que l’est le soleil, sera une juteuse affaire.
Elle suscite déjà l’intérêt de la firme algérienne Sonatrach et de plusieurs entreprises allemandes. L’Allemagne est le deuxième producteur mondial de l’électricité à partir de l’énergie solaire, derrière le Japon et devant les Etats-Unis.
On comprend donc que le plan solaire de l’UPM a été imposé par Berlin avec l’assentiment de Lisbonne, Madrid et Rome. Le Portugal construit déjà la plus grande centrale solaire photovoltaïque du monde avec une capacité de 11 mégawatts.
En Italie, le groupe pétrolier italien ENI a annoncé récemment la création d'un centre de recherche sur l'énergie solaire, baptisé ENI solar frontiers center, en partenariat avec le Massachusetts Institute of Technology (MIT, Etats Unis). Le but ? « Encourager un monde moins dépendant des hydrocarbures », a expliqué un responsable du groupe.
Source : Les Afriques