Le protocole d'intention signé par le
Croissant Rouge Palestinien (PRCS) et le Magen David Adom (MDA, le
service israélien d'urgence, d'ambulances et de don du sang) fête ses
quatre ans cette semaine.
Cet accord, auquel Micheline
Calmy-Rey, en charge du ministère suisse des Affaires étrangères, a
largement contribué, a ouvert la voie à l'intégration, en juin 2006,
des deux organisations voisines au sein de la Fédération internationale
des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.
Une
reconnaissance du travail accompli, mais aussi du chemin qui reste à
parcourir, a été formalisée lundi. Lors d'une réunion à Nairobi
(Kenya), l'assemblée des délégués de la Croix-Rouge et du
Croissant-Rouge a pris connaissance du dernier rapport établi par
l'ancien ministre des Affaires étrangères finlandais, Pär Stenbäck,
mandaté en tant qu'observateur indépendant afin de superviser la mise
en œuvre de cet accord.
Tout en mettant la coopération entre les
deux organisations, Stenbäck souligne toutefois que l'accès, pour les
habitants de Cisjordanie, aux hôpitaux du quartier arabe de
Jérusalem-Est reste un défi.
«Selon les remarques récoltées sur
le terrain, la situation est meilleure que prévue, au vu de la guerre
dans la bande de Gaza et de ce qui se passe plus généralement au
Moyen-Orient», explique Mohammed al-Hadid, président de la Commission
permanente, joint par téléphone à Nairobi. «Mais évidemment, nous ne
serons entièrement satisfaits que lorsque les accords seront totalement
acceptés.»
A relever que bien des années avant que l'accord ne
soit signé en 2005, une collaboration très limitée existait déjà entre
le MDA et le PRCS, une collaboration qui a survécu aux explosions de
violences dans la région.
Difficultés d'accès
Aujourd'hui, de nombreux problèmes très
concrets requièrent encore une amélioration de la coordination, comme
le libre passage des ambulances du Croissant-Rouge au travers des
territoires palestiniens et des points de contrôle, ainsi que l'accès à
Jérusalem et le transfert des patients de la bande de Gaza à
Jérusalem-Est.
Le traité négocié par la Suisse vise
principalement à délimiter les compétences de chaque organisation basée
sur la Ligne Verte [les lignes tracées en 1949 lors de l'armistice
entre Israël et ses voisins]. A part les difficultés rencontrées à
Hébron, les ambulances du PRCS se déplacent généralement librement en
Cisjordanie.
Mais il semble que Jérusalem-Est soit bien la zone
grise de l'accord. «Le MDA devient un problème pour nous, parce que le
MDA nous demande maintenant de faire le sale boulot», dit Amin Abu
Ghazaleh, directeur du service urgences du PRCS, se référant aux
quartiers de Jérusalem-Est où la réglementation en vigueur exige une
escorte militaire accompagnant les ambulances israéliennes, une
pratique qui entraîne souvent de sérieux retards.
Dans ce type
de situations, une ambulance du Croissant-Rouge pourra être envoyée,
mais le retard provoqué par les démarches mettra sérieusement en danger
la vie du patient, retard dont le Croissant-Rouge essuiera les
reproches par la suite, ajoute Abu Ghazeleh.
Selon Noam Yifrach,
directeur du comité exécutif du MAD, «peu importe qui nous appelle pour
obtenir une ambulance, nous en envoyons une. Nous ne transférons pas
l'appel au Croissant-Rouge palestinien».
«Ils souhaiteraient
agir plus librement à Jérusalem-Est, mais il y a certaines
restrictions, dit-il. Selon la loi israélienne, il revient au MDA
d'offrir ce service.»
La création de stations d'ambulances réparties à Jérusalem-Est est l'un des succès importants de l'accord, obtenu principalement grâce à la pression exercée sur les autorités israéliennes par le MDA.
Les cinq ambulances du Croissant-Rouge, garées
à côté des quatre ambulances de la maternité du Croissant-Rouge voisin,
ont toutes des plaques jaunes israéliennes et sont acceptées par les
autorités israéliennes.
Ces ambulances transportent les
habitants arabes de Jérusalem-Est dans les divers hôpitaux de cette
partie de la ville. Le PRCS dit que depuis juillet, ils ont aussi
l'autorisation de transporter des patients munis d'une pièce d'identité
israélienne dans les hôpitaux du quartier ouest de la ville, qui ont
une meilleure réputation, ainsi que dans les hôpitaux hors de la ville
de Jérusalem.
Mais en ce qui concerne les habitants de
Cisjordanie, une longue et pesante chaîne d'appels téléphonique doit
être mise en route et pour obtenir une ambulance, il faut parfois
jusqu'à deux heures.
Pour faire au mieux en cas d'urgence, la solution
nommée «back-to-back» (dos-à-dos) est appliquée: deux ambulances
arrivent chacune d'une direction opposée au point de contrôle et
transfèrent le patient d'une ambulance à l'autre. Cette pratique était
toutefois déjà active avant les accords.
«Il n'y a aucune
difficulté pour les ambulances du Croissant-Rouge à traverser les
territoires jusqu'à Jérusalem», constate Noam Yifrach. Mais «parfois il
y a des contretemps, ajoute-t-il. Dans 99% des cas que nous avons
contrôlés, ils transportaient simplement des patients qui n'étaient pas
en situation d'urgence.»
Une grande part du problème semble être due au fait qu'Israël souhaite renforcer son aide humanitaire tout en maintenant un contrôle des mouvements palestiniens. «Israël en tant qu'occupant est responsable de fournir aux habitants des territoires un service de santé et un accès à la santé», dit Ran Yaron, membre de l'ONG Physicians for Human Rights (physiciens pour les droits de l'homme).
«Nous demandons qu'Israël accorde la libre circulation au personnel médical en fonction.» Le service du Croissant-Rouge à Jérusalem-Est est insuffisant, ajoute-t-il. La solution est que le MDA soit amélioré pour atteindre le niveau des services offerts à Jérusalem-Ouest, cela jusqu'à ce qu'un accord politique soit obtenu.
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