Destiné en partie à stabiliser le niveau de la mer Morte, le canal qui l'alimentera en eau de la mer Rouge est un ambitieux projet écologique. Il constitue surtout un enjeu politique majeur.
La nouvelle a été accueillie avec enthousiasme dans le « triangle de la soif » : la zone Israël-Palestine-Jordanie.
Le 27 juin dernier, le ministre israélien du Développement régional, Sylvan Shalom, annonçait avoir reçu l'accord de la Banque mondiale pour la construction d'un canal reliant la mer Rouge à la mer Morte, menacée d'assèchement, d'ici à 2050, par les prélèvements israéliens sur le Jourdain et ceux effectués par la Jordanie et la Syrie sur le Yarmouk, l'un de ses affluents.
La banque aurait aussi garanti le versement de 1,25 milliard de dollars pour le développement d'un projet pilote : la mise en place d'une canalisation de 180 kilomètres acheminant 200 millions de mètres cubes d'eau par an, dont une moitié se déversera dans la mer Morte et l'autre dans un bassin de dessalement d'eau de mer géré par Israël, la Jordanie et l'Autorité palestinienne.
A terme, la construction d'un canal permettrait d'extraire 1,9 milliard de mètres cubes de la mer Rouge, dont la moitié serait destinée à être transformée en eau douce, une denrée rare dans une région vivant en deçà du seuil critique de 500 mètres cubes d'eau par an et par personne, et où la maîtrise de l'eau est un enjeu majeur.
Ainsi le projet du « Canal de la paix », envisagé pour la première fois en 1994 dans le cadre du processus de paix entre Israël et la Jordanie, semble-t-il plus politique qu'écologique. Car la mer Morte, au taux de salinité 10 fois plus élevé que celui des mers et océans du globe, est en réalité un lac alimenté... en eau douce. Et son approvisionnement en eau salée pourrait y créer un déséquilibre.
Le dessalement devrait, en revanche, réduire considérablement le « stress hydrique », source de conflits entre Israël, qui ne dispose que de très rares ressources en eau, et ses voisins. Selon la Banque mondiale, 90 % de l'eau captée dans les nappes phréatiques de Cisjordanie irrigue finalement les cultures israéliennes, seuls les 10 % restants étant livrés aux Palestiniens.
Et l'occupation par l'Etat hébreu de la partie syrienne du Golan, dont le plateau constitue une réserve naturelle alimentant le lac de Tibériade, (situé dans le nord-est d'Israël, il est une importante réserve hydraulique), envenime depuis 1967 les relations entre les deux pays. Aussi le « Canal de la paix », s'il parvenait à voir le jour, porterait-il bien son nom.
Source : Le Figaro
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