La Libye a franchi un pas important dans le règlement de la lancinante question du manque d’eau avec l’inauguration, en 1991, de la première phase du projet du Grand fleuve artificiel.
Considéré comme l’un des plus grands projets d’adduction d’eau jamais réalisés par l’homme, l’ouvrage permet de transporter quotidiennement, à travers un réseau de plusieurs milliers de kilomètres d’aqueducs géants, des millions de mètres cubes d’eau du fond du désert libyen jusque dans les agglomérations urbaines du littoral où se trouvent les terres fertiles.
Au fur et à mesure de l’évolution des différentes phases d’exécution du projet, les autorités libyennes ont songé, au- delà des usages ménagers, en tirer le maximum de profit, notamment dans l’agriculture, par la création d’une structure d’exploitation baptisée Office d’exploitation des eaux du système de Jabal Hassouna-Jeffara, dédié à la création de projets agricoles.
Cette orientation apparaît aujourd’hui, selon les observateurs, comme une "option pertinente", vu la montée des prix des produits alimentaires sur les marchés mondiaux qui a amené les autorités libyennes à adopter une stratégie agricole fondée sur la réalisation de l’autosuffisance alimentaire.
A travers cette option, il s’agit, surtout, de garantir l’indépendance économique et politique du pays, car selon la formule consacrée en Libye, "il n’y a pas de liberté pour un peuple qui importe sa nourriture de l’étranger".
Ainsi, l’Office d’exploitation des eaux du système de Jabal Hassouna-Jeffara, qui fait partie d’autres institutions créées pour l’exploitation de l’eau du Grand fleuve artificiel, est chargé de l’investissement de 65 pc de l’eau drainée à travers le système d’adduction de l’ouvrage, qui atteint 2,5 millions de m3, dont 67,3 pc sont utilisés à des fins agricole, soit 1,7 million de m3 d’eau quotidiennement pour irriguer une superficie de 106.233 ha .
Cette surface représente des projets agricoles existants, des domaines agricoles privés et de nouveaux projets agricoles dont 90 pc se situent sur la bande du littoral qui s’étend de la ville de Muserata (est) jusqu’à la ville de Sabratha (ouest) et constitue le grenier du pays, eu égard à la qualité du sol et au climat de cette région aux caractéristiques appropriées à l’agriculture.
Dans ce cadre, cinq programmes agricoles ont été réalisés, dont le projet Tarhouna, situé à 90 km au sud de Tripoli sur une superficie de 950 ha et disposant de 9,13 millions de m3 par an, ainsi que le projet Abou Aïcha, localisé à 60 km sud de Tripoli et s’étendant sur 3.320 ha pour 29,2 millions de m3.
Il y a aussi le projet Souf Al-Djin, à 245 km sud-est de Tripoli, établi sur 2.000 ha avec 34,67 millions de m3 d’eau annuellement, le projet Tajmout, à 95 km sud de la capitale, avec 700 ha et 7,3 millions de m3, et enfin le projet Grarat Al-Gatf, situé à 280 km au sud-est de Tripoli, exécuté sur 2000 ha avec une quantité annuelle d’eau de 34,67 millions de m3.
La réalisation du projet du Grand fleuve artificiel, en tant qu’alternative pour résoudre les problèmes de l’eau en Libye, intervient surtout comme réponse à la croissance des concentrations urbaines, qui a comme corollaire le développement de l’activité agricole et industrielle.
L’autre grande raison est liée aux changements climatiques qui ont conduit à une baisse de la pluviométrie, ce qui a provoqué le quasi-tarissement des ressources hydrauliques, notamment de la nappe phréatique. Cette situation a été aggravée par l’infiltration de l’eau de mer dans les eaux souterraines, dont la qualité s’en trouve détériorée.
Ainsi, parmi les priorités du projet du Grand fleuve, on note le rééquilibrage hydrique des régions du littoral dans le nord du pays, mais aussi, l’assurance d’une certaine sécurité dans le domaine de l’hydraulique et alimentaire étant donné qu’ils constituent des préoccupations stratégiques de tous les pays du monde, eu égard à la rareté des ressources en eau.
La réalisation d’un changement environnemental à travers l’émergence de conditions bioclimatiques adéquates par la préservation de l’agriculture, la mise en valeur de nouvelles superficies, ainsi que la construction d’une ceinture verte à partir d’arbres brise-vent, la revivification des projets agricoles existant, l’exploitation optimale des investissements colossaux consentis figurent parmi les objectifs de cet ouvrage.
La mise en oeuvre du projet du Grand fleuve artificiel doit également opérer un développement global aux niveaux économique, social et environnemental et être d’un apport bénéfique au profit du peuple libyen.
Il va contribuer à l’augmentation du rendement du mètre cube d’eau à travers la rationalisation de la consommation, ainsi qu’à l’introduction de techniques d’irrigation de pointe afin de garantir une exploitation optimale des eaux et l’établissement d’une stabilité des populations dans les régions ciblées par les projets d’exploitation des eaux.
Source : AfriqueEnLigne
Commentaires