Ici, c’est un véritable problème, un véritable combat de tous les
jours. Jeter un papier par terre ? Pas grave. Une bouteille dans une
rivière ? Normal.
Ce genre de geste arrive malheureusement partout dans
le monde, en France comme ailleurs. Mais ici c’est tous les jours, tout
le monde, tout le temps.
Certes les quartiers de la ville de Beyrouth,
comme dans d'autres villes du pays d’ailleurs, sont nettoyés par des
entreprises privées.
Il y a très peu de déchets, « les hommes en verts présents dans tous les coins sont là pour nettoyer »,
n’hésitent pas à dire certains tout en jetant une canette d'une
quelconque boisson gazeuse sur le sol.
Mais ce n’est pas le cas
partout, comme pour le littoral libanais par exemple.
Quant on roule en direction du sud du pays, alors que s’offre à vous la
mer Méditerranée toute entière à votre droite, vous ne pouvez que
constater les déchets rejetés par cette étendue bleue. Ce n’est pas de
l'écume qui se dépose sur le sable. Non. Loin de là.
Ce sont des
centaines de papiers, sacs plastiques et autres trouvailles.
En mars
dernier, il y a eu un tremblement de terre qui aurait causé la "fuite"
vers le large de quelque 150 tonnes de déchets.
D'où provenaient-ils ?
De la "montagne de Saïda", une montagne d'immondices de quelque 600
mètres cubes, de la hauteur d'un immeuble de quatre étages, où
s'accumulent les détritus depuis 30 ans.
Et le spectacle est le même le long des routes. Vous allez me dire, le
bord des autoroutes françaises n’est très joli non plus, et je vous
l’accorde.
Mais ici, les monticules de terre qui bordent l’autoroute
sont tachetés de blanc ou d’autres couleurs. Au premier coup d’œil, on
se demande ce que cela peut bien être.
Puis, on fronce les sourcils, en
raison du soleil, on force sur ses yeux (oui je suis un peu myope). La
voiture roule à toute vitesse. Et on distingue une bouteille en
plastique, puis deux, trois, quatre… et cela n’en finit pas.
« Le Liban est encore un pays que l’on peut préserver. Il est
encore temps. Nous ne devons pas le détruire comme ce que vous avez
fait chez vous, vous, les occidentaux », m’expliquait Cherine
Yazbeck, auteure du guide touristique « le Liban autrement », faisant
alors référence à la forêt d’immeubles présente sur les montagnes du
Mont Liban.
Des immeubles qui ont remplacé de nombreux arbres.
Mais ici, c’est tout un comportement qui est à revoir. Pour ce qui
concerne les immeubles, il n’y a, du moins à Beyrouth, aucune politique
de la ville.
Un lopin de terre, allez hop, un immeuble. Les « buildings
» poussent comme des champignons détériorant dans la même veine le
patrimoine libanais.
Plusieurs libanais et experts commencent
d’ailleurs à tirer la sonnette d’alarme sur ce point. Mais, pour le
moment, très peu semble se soucier de la nature elle-même.
« Nous avons d’autres problèmes »,
m’expliquait récemment « un jeune financier libanais
travaillant à Dubaï » (c’est exactement comme
ça qu’il s’est présenté !), alors que
je venais de le sermonner car il avait jeté sous mes yeux un
verre en plastique dans une rivière.
Il m’avait alors
expliqué - avec cet air qu’ont les libanais, très
sûrs d’eux comme si rien ne pouvait leur arriver -
qu’il avait autre chose à penser qu’à
l’environnement.
Comme quoi ? le pouvoir d’achat de sa
famille qui chute alors que des politiciens s’en mettent pleins
les poches, « une guerre à mener », « une paix à trouver »… Je pouvais alors entendre la voix de Cherine me dire : « si
tous les libanais continuent à résonner de la sorte, il
n’y aura plus de Liban avant d’avoir trouvé un
accord de paix avec le voisin… »
Source : Médiapart