Les députés algériens discutent d'un projet de loi qui modifierait une loi vieille de quarante ans sur les conditions d'entrée et de séjour des étrangers.
Les députés algériens discutent d'un projet de loi qui modifierait une loi vieille de quarante ans sur les conditions d'entrée et de séjour des étrangers.
Ses partisans affirment que cette mesure permettra de faciliter l'entrée et la circulation légales des étrangers tout en permettant de mieux lutter contre les trafics en tout genre et le terrorisme, mais des questions se font jour sur les projets de centres de détention que comporte cette nouvelle législation.
Un projet de loi gouvernemental visant à imposer de nouvelles conditions à tous les étrangers entrant, séjournant et se déplaçant en Algérie a été déposé sur le bureau de l'assemblée mercredi 9 avril.
Le Ministre de l'Intérieur Noureddine Yazid Zerhouni, qui présentait ce projet de loi lors d'une session de l'Assemblée Populaire Nationale (APN), a déclaré que cette mesure aidera les responsables de la sécurité à contrôler l'identité des étrangers et à combattre plus efficacement le terrorisme et les activités criminelles.
Le texte régissant la présence des étrangers est en vigueur depuis 41 ans ; les partisans de ce projet de loi affirment que la situation sécuritaire de l'Algérie, ainsi que les évolutions de la législation internationale, l'ont rendu obsolète.
"L'Algérie doit faire face aujourd'hui au crime organisé dans le secteur économique, au trafic de drogue et à la contrebande des armes en relation avec le terrorisme", a déclaré le ministre, expliquant qu'au plan international, en particulier dans l'Union Européenne, la législation avait été adaptée pour renforcer les contrôles d'immigration.
Cette nouvelle loi facilitera l'entrée et les déplacements légaux des étrangers, tout en permettant de lutter plus efficacement contre l'immigration clandestine, la contrebande et les atteintes à la sécurité.
Elle prévoit une aggravation systématique des sanctions pénales contre les réseaux des passeurs, les sociétés transportant des immigrants clandestins et les entreprises employant des étrangers en situation irrégulière.
Les étrangers qui souhaitent s'établir de manière permanente en Algérie recevront un permis de résidence valable pendant deux ans, tandis que les stagiaires ou les personnes disposant d’un contrat de travail pourront obtenir, en fonction de leur situation, des cartes de résidence de moins de deux ans.
La loi envisage toutefois la possibilité de délivrer une carte de séjour d'une durée de validité de dix ans aux ressortissants étrangers qui se sont établis en Algérie d'une façon continue et légale pendant sept ans ou plus.
Outre cela, cette loi rendra obligatoire le visa biométrique dans les représentations diplomatiques, avec des relevés d'empreintes et des photographies des étrangers au niveau des postes frontaliers ou lors de contrôles de police effectués sur le territoire national.
La souscription à une assurance voyage et l’acquittement du droit du timbre pour la délivrance de la carte de résident seront également obligatoires.
Mais le projet de loi introduit une nouveauté qui n’a pas manqué de soulever les critiques des députés, à savoir la création de centres d'accueil pour les immigrés clandestins dans l’attente de leur reconduite à la frontière ou leur rapatriement.
Certains députés ont demandé que cette disposition soit purement et simplement annulée, dénonçant une mesure qu'ils jugent incompatible avec la liberté, et affirmant qu'elle sacrifie l'humanisme au bénéfice de la sécurité.
Répondant aux critiques des parlementaires, M. Zerhouni a déclaré : "Cela ne veut pas dire que l'Algérie va renoncer à ses positions de solidarité avec les peuples, ses principes sur les Droits de l'Homme, et qu'elle veut s'enfermer sur elle-même."
Un chercheur qui a mené plusieurs travaux sur le sujet des migrations estime que les préoccupations des députés sont valables.
Saïb Musette explique en effet que "le point le plus contestable" de ce projet de loi est "la création de centres d’accueil et la possibilité donnée aux walis de procéder à des expulsions, ce qui n’est pas conforme aux conventions ratifiées par l’Algérie en matière de protection des droits des migrants."
"J’aurais souhaité avoir le texte sous les yeux pour le comparer avec les dispositions marocaines ou tunisiennes", ajoute M. Musette.
Malgré la couverture réservée par la presse dans ses éditions aux débats à l’Assemblée Populaire Nationale, il n'y a eu que peu de réactions populaires en Algérie.
Salaheddine Badaoui, gérant d'une entreprise, a déclaré n’être absolument pas au courant de ce projet. “Je vais tout de suite m’informer”.
Source : Magharébia
Commentaires