Désertique à 93%, la Libye des Kadhafi, forte de son retour sur la
scène internationale, veut désormais entrer dans l'ère du développement
durable, pour préserver ses trésors archéologiques méconnus et ses
rares régions verdoyantes menacées.
Un programme écologique ambitieux, qui concerne la
région montagneuse de Djebal Al-Akhdhar (la "Montagne verte"), à 1.200
km à l'est de Tripoli, a été lancé lundi par Seïf al-Islam, le fils du
dirigeant libyen Mouammar Kadhafi.
"Il est temps de se joindre aux pays développés et
montrer que la Libye est aussi concernée par l'environnement et la
culture", a clamé à cette occasion le fils du leader libyen, qui fut
très actif cet été à la tête de sa fondation dans le dénouement de
l'affaire des infirmières bulgares, qui empoisonnait les relations avec
l'Occident.
Le lancement du projet, au coeur de la cité grecque de
Cyrène fondée en 631 avant Jésus-Christ, a donné lieu à la signature en
grande pompe de la "Déclaration de Cyrène", un engagement de la Libye à
préserver les vestiges et la biodiversité de cette région classée par
l'Unesco au patrimoine mondial.
En habit traditionnel, au pied des colonnes
monumentales de l'imposant temple de Zeus surplombant la Méditerranée,
Seif --surnommé "l'ingénieur" en Libye-- a affirmé que cette zone
désormais protégée de 5.500 km2, et bordée de 200 km de côtes, serait
la "première du genre au monde".
"Ce trésor n'est pas uniquement pour les Libyens mais
pour toute l'humanité", a-t-il fait valoir, devant des dizaines de
journalistes et invités venus d'Europe et des Etats-Unis.
Ecotourisme, réserves naturelles, préservation de la
faune et de la flore, industries propres, énergies renouvelables: le
but est de parvenir à "zéro émission" de CO2, selon les promoteurs de
ce projet, confié au célèbre architecte britannique Norman Foster,
notamment connu pour ses travaux sur le Bundestag, le Parlement
allemand.
Une "Autorité de la protection et du développement de
la montagne verte" (Gmcda), composée d'ingénieurs, archéologues et
d'experts en environnement, aura pour mission de veiller à l'exécution
du projet, et notamment de mobiliser les investissements étrangers,
dont le montant n'est pas précisé.
"C'est un grand projet et nous avons besoin d'une
assistance et d'une aide étrangères", a expliqué Seïf al-Islam, qui a
promis 70.000 emplois aux jeunes de la région, d'où est native sa mère.
"Ce que nous voyons maintenant n'est que 10% des
vestiges, le reste est enfoui sous terre. Il nous faut une grande
campagne pour faire sortir ces trésors", a-t-il insisté, espérant un
"engagement de l'Union européenne pour aider à la restauration des
anciennes cités en Libye".
Selon Joseph Stanislaw, conseiller indépendant en
matière d'énergie, présent lors de cette cérémonie, le projet, unique
au monde "par sa taille et son approche holistique", sera financé "à
parts égales" par la Libye et des investisseurs étrangers. Il pourrait
coûter "des milliards et milliards de dollars".
"La préservation de ce joyau est un moyen de développer
des industries, de créer une économie locale dynamique et de préserver
le patrimoine culturel de la région", ajoute ce président de JA
Stanislaw Group, une entreprise impliquée dans l'élaboration du projet.
Les incendies de forêt et l'urbanisation galopante ont
détruit des milliers d'hectares de forêt dans cette région qui ne
compte plus que 180.000 hectares d'arbres contre 500.000 il y a 20 ans.
La Montagne verte est "au bord de la catastrophe
environnementale et culturelle", a souligné le président du département
archéologie de Libye, Jomâa Anag.
"C'est un projet grandiose", a pour sa part relevé un
diplomate arabe, émettant le souhait que Tripoli ne se contente pas en
la matière d'un simple "effet d'annonce".
Source : AFP