Au cours d'une conférence à l'AUB, plusieurs académiciens et professionnels du secteur informatique ont déploré l'absence de politique nationale et la difficulté d'accès au financement, qui constituent, selon eux, les deux principaux obstacles à l'émergence d'un pôle d'industries de pointe au Liban.
Le sujet d'une éventuelle implantation d'un pôle d'industries informatiques au Liban, calqué sur le modèle de la Silicon Valley aux États-Unis, a été au cœur d'un débat organisé samedi dernier à l'Université américaine de Beyrouth (AUB), auquel a participé une centaine d'étudiants.Au cours de ce débat, animé par des professeurs à l'AUB et des professionnels du secteur des nouvelles technologies, les intervenants ont mis l'accent sur le potentiel dont dispose le Liban, notamment en matière de capital humain, et l'importance de ce potentiel pour tout éventuel projet d'implantation d'un pole d'industries de pointe dans le pays.
Ils ont toutefois déploré l'absence de vision globale et la négligence de l'État pour le secteur informatique ainsi que la difficulté d'accès au financement, qui constituent, selon eux, les principaux obstacles à la réalisation d'un tel projet.
Les cas des diverses « Silicon Valleys » à travers le monde, notamment aux États-Unis, en Inde et en Irlande, ont été examinés à cette occasion.Ainsi, Mohammad Mansour, professeur à l'AUB, a évoqué, durant son intervention, l'aspect technique de la production au sein de la Silicon Valley aux États-Unis, à la lumière de la prolifération des transistors dans les différents outils informatiques : ordinateurs portables, imprimantes, téléphones portables, caméras, baladeurs MP3.
De son côté, Youssef Aziz, consultant financier du Forum économique pour la jeunesse (Youth Economic Forum), a présenté la Silicon Valley américaine, mettant en relief les principales compagnies ayant connu un franc succès, avant d'analyser les facteurs qui ont permis le succès des Silicon Valleys indienne et irlandaise.
Il a notamment évoqué les mesures prises par les gouvernements des deux pays visant à encourager l'implantation de start-ups et à faciliter les investissements dans le secteur de l'informatique.
À cet égard, il a insisté sur le fait que le projet de la Silicon Valley ne serait envisageable au Liban en l'absence d'une politique nationale et d'une implication plus importante de l'État.Le vice-président du Forum économique pour la jeunesse, Karim Mufti, a, quant à lui, évoqué les points forts de l'économie nationale qui favoriseraient l'implantation d'un pole d'industries de pointe, tout en mettant l'accent sur les faiblesses qui entraveraient la concrétisation de ce projet.
Il a noté à ce sujet que le produit intérieur brut (PIB) du Liban n'a cessé de croître au cours des deux dernières décennies, passant de 20 milliards de dollars au début des années 90 à 33 milliards aujourd'hui. Cet essor a été, selon lui, rendu possible grâce au développement de trois secteurs majeurs, à savoir l'immobilier, le tourisme et le secteur bancaire.
Ce dernier a tiré l'économie vers le haut , notamment grâce à une croissance des prêts de 15 % en 2009, laquelle croissance n'a toutefois pas profité au secteur de l'informatique, a-t-il insisté. Notons à cet égard que les banques locales refusent souvent d'accorder des crédits aux sociétés informatiques dont les avoirs se limitent à de la « matière grise ».
Cela constitue, aux dires de nombreux professionnels du secteur, un frein important au développement de l'industrie.
Karim Mufti a d'ailleurs insisté, durant son intervention, sur la nécessité de restructurer l'économie ainsi que les mentalités en accordant plus d'importance au secteur informatique.Quant aux autres faiblesses de l'économie, il a également rappelé le manque d'adaptation du secteur public, le haut degré de corruption, l'instabilité politique et l'inefficacité du système juridique.
De plus, les transferts d'argent de la diaspora, qui se sont élevés à 6 milliards de dollars en 2009, sont malheureusement d'avantage utilisés pour la consommation et l'épargne que pour l'investissement, a-t-il ajouté.
Il a également déploré la concentration géographique des investissements, indiquant que près de 80 % des investissements effectués au Liban en 2009 avaient eu lieu dans la région de Beyrouth.
Enfin, le président de l'association Rootspace (impliquée dans le développement économique et social), Munir Nabti, a évoqué les éléments-clés de l'innovation, insistant sur les avantages compétitifs du Liban en termes d'aptitude à innover via la qualité de ses jeunes diplômés.Rappelons qu'aujourd'hui, la grande majorité des entreprises libanaises de logiciels sont des distributeurs de produits conçus par des multinationales étrangères. Au cours des dernières années, une série de nouvelles sociétés, spécialisées uniquement dans le développement de logiciels, a toutefois vu le jour.
Aucune étude spécifique n'a encore été effectuée sur le secteur. Néanmoins, selon des informations communiquées par l'Association des entreprises informatiques au Liban (PCA), le secteur des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC- qui englobe éditeurs et agents) compte aujourd'hui entre 6 000 et 8 000 professionnels dont 66 % d'ingénieurs et d'informaticiens.
En 2006, son chiffre d'affaires global était estimé à 641 millions de dollars et devrait atteindre près d'un milliard de dollars en 2011.
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