Même si les poètes décrivent le pays comme celui du "soleil et de l'eau", l'accès à l'eau potable et courante reste un véritable cauchemar pour un grand nombre de Libanais qui doivent l'acheter en raison du gaspillage et d'un réseau d'assainissement, de distribution et de stockage inexistant ou inefficace.
"J'achète de l'eau depuis mon arrivée ici voilà 14 ans", raconte à l'AFP Mme Hatem dans son village d'Amchit, au nord de Beyrouth. "Durant l'été, lorsque la demande est trop forte pour les camions-citernes, je me retrouve souvent sans une seule goutte pendant plusieurs jours".Pourtant, le Liban (quelques 4 millions d'habitants) est l'un des rares pays au Moyen-Orient considéré comme riche en eau.
Bordé à l'ouest par la Méditerranée, et frontalier de la Syrie et d'Israël, ce petit pays possède 40 cours d'eau, 2.000 sources et de nombreuses cascades résultant de la fonte des neiges.Mais la guerre civile (1975-1990) suivie de plusieurs années de crises politiques ont mis en veilleuse cette question. Les droits sur l'eau sont aussi une source de conflit entre le Liban et Israël où cette ressource est moins abondante.
"Alors que nous célébrons la Journée mondiale de l'eau lundi, nous devrions pouvoir exporter cette ressource plutôt que de la voir diminuer petit à petit", dit Antoine Issa, le maire d'Amchit. "C'est une bénédiction et nous ne savons pas l'apprécier", déplore-t-il.Pour de nombreux experts, le Liban doit rapidement prendre les mesures nécessaires pour protéger ses ressources, sinon l'eau manquera bientôt.
Fadi Comair, chef du département des ressources hydrauliques et électriques au ministère de l'Eau et l'Energie, juge impératif d'agir rapidement."Si l'on prend en considération l'accroissement démographique et le réchauffement climatique, les ressources hydrauliques seront suffisantes jusqu'en 2015" seulement, met-il en garde.
"Il n'y a pas de solution miracle. Il faut stocker l'eau dans les barrages, les lacs collinaires et grâce à un nouveau réseau", ajoute-t-il.Selon lui, le Liban dispose en moyenne annuellement de 2,1 milliards de m3 de ressources hydrauliques renouvelables (fonte des neiges et pluies).
"Nous utilisons environ un milliard pour les besoins en eau potable, pour l'irrigation et d'autres besoins industriels. Le reste, c'est-à-dire plus de la moitié, se jette dans la Méditerranée", dit-il.Selon les experts, un autre problème est que l'eau de plusieurs fleuves n'est pas exploitée en raison de leur cours stratégique, certains étant partagés entre le Liban et Israël.
"L'eau est une question politique sensible et toute tentative du Liban d'exploiter ses fleuves dans le sud se heurtera à une réaction d'Israël", affirme Nadim Farajalla, professeur à l'Université américaine de Beyrouth.Un triste exemple de gaspillage: dans le Akkar (nord), l'une des régions les plus pauvres du Liban mais riche en nappes d'eau souterraines, 54% seulement des maisons sont reliées au réseau de distribution.
Mais même ceux ceux là n'ont pas toujours l'eau courante "car l'infrastructure est obsolète et les fuites sont énormes", déplore Aisha Mushref, qui travaille avec l'ONG Mada."Les habitants de la région vont encore chercher de l'eau à la rivière", dit-elle.
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