Il est évident que le Liban possède des ressources naturelles remarquables ... et exploitables, ne serait-ce qu'au seul niveau de l'énergie solaire, sans prendre en considération l'hydraulique ou l'éolien. En effet, le pays possède une moyenne d'ensoleillement de 300 jours par an, soit de quoi produire potentiellement entre 2 et 6 kilowatts-heure au mètre carré (kWh/m2).
Un chemin parsemé d'embûches
Cependant, la loi 462 votée en septembre 2002 dans le but de réglementer le secteur de l'énergie n'a toujours pas été appliquée. Il n'est donc pas possible pour le moment de revendre l'électricité produite par les technologies vertes (solaire, éolienne, hydraulique...), ce qui pose problème aux compagnies désirant exploiter le potentiel énergétique à portée de main.Plusieurs organisations et associations, dont notamment le Centre libanais pour la conservation de l'énergie (LCECP), se sont de ce fait mobilisées au cours de ces dernières années afin que la réforme du secteur de l'énergie soit concrétisée.
Pour M. Albert Khoury, directeur général adjoint de la compagnie privée Électricité de Aley (E-Aley), qui travaille notamment sur une campagne d'informations sur l'énergie solaire en partenariat avec le programme des Nations unies pour le développement au Liban (PNUD), il ne fait aucun doute que les énergies renouvelables représentent l'avenir : « L'énergie éolienne est compétitive (sur le marché), l'énergie solaire thermique est essentielle. »
Interrogé par L'Orient-Le Jour sur la situation actuelle et future du secteur des énergies alternatives, M. Khoury est optimiste : « C'est la réalité, c'est déjà là. Par exemple, notre projet d'implantation d'éoliennes dans la région du Akkar, qui vise à long terme à assurer la production massive d'énergie verte et qui est intégralement subventionné par des fonds privés, est prêt à être lancé. Il attend simplement que le gouvernement se penche sur la loi 462. Je ne doute pas un instant de l'engagement du ministre de l'Énergie et des Ressources hydrauliques, M. Gebran Bassil, à ce niveau. E-Aley devra simplement attendre que son agenda chargé se libère, ce n'est qu'une question de temps (...) ».
Des technologies à petite échelle
La génération d'énergie étant donc limitée au Liban à un usage strictement privé, l'intérêt résiderait surtout dans des technologies à petite échelle qui, combinées, permettraient de faire la différence. Plus en détail, deux procédés principaux permettent d'exploiter le potentiel solaire libanais : la génération d'énergie photovoltaïque (PV) obtenue grâce aux panneaux solaires, et l'énergie solaire thermique, permettant par exemple de chauffer des logements ou des réservoirs d'eau.D'après plusieurs experts, dont notamment M. Shukri Bosheh, directeur régional des ventes et marketing au Moyen-Orient de la compagnie internationale Millenium Energy Industries, spécialiste de l'énergie solaire dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, le solaire thermique serait beaucoup plus avantageux que le PV.
« Nous sommes actuellement focalisés sur l'énergie thermique (...) car la technologie PV est plus chère, et le marché n'est pas encore développé », indique M. Bosheh. Seuls certains cas isolés nécessiteraient l'utilisation du PV, comme par exemple l'impossibilité d'un raccordement au réseau électrique public.
Concrètement, d'après le LCECP, l'intérêt de la technologie solaire thermique résiderait principalement au niveau des chauffe-eau solaires privés, en augmentation constante au Liban. Une étude publiée en 2007 par l'organisation environnementale libanaise indépendante Greenline a ainsi démontré qu'un chauffe-eau solaire sur 4m2 d'un coût de 1 000 dollars environ (soit la gamme la moins chère ; les prix variant entre 1 000 et 1 700 dollars sur le marché, selon le LCECP) pouvait subvenir aux besoins d'une famille pendant toute l'année tout en permettant de réduire leur consommation d'électricité de 20 % soit 1 381 kWh/an, et donc d'économiser 184 dollars annuellement avec un amortissement sur 5 ans.Plusieurs projets ont en outre été lancés ou sont en cours de lancement par des organisations non gouvernementales, environnementales ou privées. Millenium Energy Industries a confirmé qu'elle travaille sur « plusieurs projets au Liban, principalement dans le domaine hospitalier ou pour des clients appartenant au secteur industriel et désirant réaliser des économies d'énergie ».
Une forte dépendance aux énergies fossiles
En tout état de cause, le gouvernement multiplie les promesses d'orienter le Liban à long terme vers une politique axée sur les énergies propres, promettant d'atteindre d'ici à 2020 une production énergétique de 12 % à partir des technologies alternatives.
Le ministre de l'Environnement, M. Mohammad Rahal, a en effet récemment déclaré que l'État libanais perdait plus d'un demi-milliard de dollars annuellement en raison de la pollution, « dont 100 millions liés au changement climatique » tout en soulignant la volonté du cabinet de mettre en place des réformes concrètes afin d'encourager la production de ressources alternatives.
Cela étant, l'intérêt récent du gouvernement pour les énergies vertes tombe à point. En effet, tout tend à démontrer que pratiquement et économiquement, l'utilisation exclusive des énergies fossiles n'est pas un procédé viable à long terme, en plus de tous les effets négatifs produits sur l'environnement.
Le Liban importe en effet la quasi-totalité de ses besoins énergétiques et a par exemple déboursé en 2007 plus de trois milliards de dollars en achat de produits pétroliers, soit environ 13 % du produit intérieur brut (PIB) de l'année.
L'Électricité du Liban (EDL) reste donc largement dépendante des fluctuations des prix du pétrole dont une nouvelle flambée ne rendrait pas service à cette institution étatique croulant déjà sous des milliards de livres de dettes.
De plus, le besoin grandissant de la population peine à être satisfait, comme l'illustre le rationnement électrique, été comme hiver, dont souffrent (presque) tous les Libanais.
L'ancien ministre de l'Énergie et des Ressources hydrauliques, Alain Tabourian, n'a-t-il pas rappelé en juillet dernier l'existence d'un déficit structurel entre l'offre et la demande, notant que la capacité de production s'élevait à 1 500 mégawatts tandis que la consommation locale atteignait 2 300 en été ?
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