C’est un atelier comme on les aime. Il y a de la pédagogie et de la découverte. On en sort plus informé. Il s’inscrit dans le cadre du cycle des workshops qui gravitent autour de l’innovation, initiés par la coopération allemande GTZ.
Celui-ci qui a eu lieu ce samedi 6 juin porte sur la manière de structurer une démarche commerciale sur un stand à l’occasion d’un salon professionnel à l’international. Ridha Mahjoub, DG de TPI, bureau de Conseil en commerce international était «guest speaker».
L’abécédaire marchand
Le conférencier est homme de terrain. Il a été dans le premier peloton de conseillers en négoce à l’international ayant accompagné le premier jet du Famex.
A l’heure actuelle, il est lui-même promoteur de stand dans les salons professionnels internationaux. Il allie une formation à une expérience pratique qui a abouti.
Son itinéraire est pour le moins conséquent. Sa communication s’intitule "Négocier à l’international, comment éviter les écueils". On pourrait tout aussi bien l’appeler l'abécédaire du "marchandage " sur stand.
En réalité, sans le dire, Ridha Mahjoub a rédigé un manuel de procédures. Il y recense les bonnes pratiques, au sens des bonnes recettes de comportements et d’échanges relationnels.
Le choc des mots, le poids des egos
La rencontre entre un vendeur et un prospect sur un stand est un moment qui doit être réglé comme du papier à musique. C’est une partition qu’il faut roder au préalable pour qu’elle soit fin prête le jour J.
Ce moment est une rencontre entre deux individualités qui peuvent parfois représenter deux cultures que tout éloigne. Dans cet échange s’interposent la communication, la stratégie autant que la tactique. Il y a donc à bien peser les mots et ménager les egos toujours avec pour objectif, finaliser une vente.
Le conférencier a formalisé un cadre pour y faire figurer toutes les contraintes des aires culturelles, des techniques d’échange et de com’, des paliers de concession. Une série de consignes leur font face de sorte à déjouer les pièges et autres écueils pour s’acheminer vers un accord final.
L’importance du flash émotif
Dans une rencontre entre deux personnes qui se découvrent, les 20 premières secondes ont autant d’importance que les 20 premiers mots de même que les 20 premiers gestes, c’est ce laps de temps qui va lancer la négociation. C’est un moment qu’il faut préparer avec minutie.
Un grand pilote de course racontait que pour gagner en Formule 1, il faut être celui sui se trompe le moins. La messe est dite. Se tromper revient à improviser ou répondre de manière cavalière. Ce peut être l’usage d’un stéréotype culturel choquant provenant de l’ignorance de l’univers de l’autre. Ce peut être une maladresse de présentation. Ce qu’il faut garder à l’esprit, c'est que le non-verbal transmet 70% environ de notre statut, selon les experts, à la personne qui est en face. D’où l’intérêt de bien soigner les détails.
L’art de la négociation : les consignes de base
Avant de s’engager dans une négociation, veiller à repérer la personne clé. C’est elle qu’il faut entourer d’attention car c’est elle qui signe en bout de course. Pour ne pas s’éparpiller, se souvenir qu’une personne subit la hiérarchie des paliers ergonomiques. Elle ne retient que 10% de ce qu’elle lit, 20% de ce qu’elle entend et 30% de ce qu’elle voit mais va jusqu’à 90% de ce qu’elle explique en faisant. Alors, au moment de faire l’article, associer le prospect à la démo’, de la sorte il percevra le plus de votre message et en saura le plus sur votre produit.
Écouter de manière active et tolérer l’objection
Prêter l’oreille et répondre à propos est une attitude d’intelligence, dite écoute active. Il est recommandé, quand on est hors de sa sphère de proximité régionale et linguistique, de recourir aux services d’un interprète du pays «native» pour éviter les pièges de langue et de langage. Il faut comprendre où l’autre veut en venir ou parfois ses priorités et ses centres d’intérêt. Cela, en général, dissipe les malentendus. C’est cette écoute active qui fait que l’on sait exactement quoi concéder et à quel moment.
L’accord final, le sens de l’instant
La négociation doit s’acheminer vers l’accord final. On y va sans trop forcer et cela vient à travers les récapitulations et la reformulation des propos du client. Quand l’instant se présente, il faut savoir le détecter. C’est un sens qui se cultive. Quand le client est prêt à signer, il ne sert à rien de continuer à palabrer. Il faut être prompt à le forcer à passer commande et point final.
Ce moment ne doit pas être un instant d’euphorie car un excès de joie pourrait laisser le client penser qu’il s’est fait avoir. Et le conférencier d’éveiller au syndrome du «one short deal». Un contrat qu’on ne renouvelle pas par ce genre de frivolités.
Se faire conseiller
Le conseil à l’export s’inscrit dans l’immatériel. C’est du métier. Le conférencier s’emploiera à prouver que le conseil est un input non négligeable, on veut négocier pour aboutir à vendre. Opérer sur un stand nécessite un training ad hoc. Ridha Mahjoub est catégorique: tout se prépare, tout se scénarise sur un stand.
Ridha Mahjoub : «Négocier à l’international ne s’improvise pas, ça s’apprend»
Quel est le message de votre communication ?
Ce qu’il faut retenir, c’est qu’une négociation à l’international est avant tout une technique. Elle doit, par conséquent, être bien rodée et bien assimilée. Négocier à l’international ne s’improvise pas. C’est une préparation et une assimilation des codes et rites culturels de la partie avec laquelle on négocie.
Cela exige beaucoup d’intelligence des deux parties. J’entends une intelligence au sens réel et une intelligence économique. Il faut de la préparation pour disposer de l’information et préparer l’entretien dans toutes ses étapes. La façon avec laquelle on ouvre la négociation, avec laquelle on négocie et la façon avec laquelle on choisit le moment pour clôturer. Et en clôturant, comment ménager une issue pour qu’en cas où les choses ne se réalisent pas, on puisse rattraper la situation.
Découvrir la culture des autres est nécessaire?
La découverte d’un partenaire est un préalable nécessaire. Il faut manipuler les clichés avec beaucoup de précaution car ils peuvent induire en erreurs. S’appliquer à trouver les objectifs et les priorités du partenaire. Et, surtout s’adapter à sa culture. Il est hors de question de se ramener avec le même modèle de vente vis-à-vis de clients qui sont de cultures différentes.
La démonstration sur stand est importante ?
On est en plein dans le cas de figure du «learning by doing». La meilleure façon d’apprendre c’est de faire. On peut expliquer de mille façons verbales avec la gestuelle, c’est jamais assez. La meilleure façon, techniquement, c’est de mettre le produit entre les mains du client et qu’il essaie ça.
Les 20 premiers faits et gestes sont déterminants ?
La négociation est semblable à une pièce de théâtre. Les meilleurs acteurs
répètent à satiété jusqu’à maîtriser le speech et le gestuel et ils les
assortissent ensemble pour produire le meilleur effet. Il ne faut pas
laisser cela à l’improviste.
Se toucher, c’est à ce point gênant ?
Là encore il faut s’imprégner de la culture de l’autre. Il y a des pays où il faut se toucher et d’autres ou il faut garder ses distances. Ce sont les contraintes du relationnel. En Méditerranée, c’est d’usage. Ailleurs, ce peut-être prohibé.
Bien régler la com’, c’est pour éviter les malentendus ?
Reprendre les propos est la meilleure façon de vérifier que la personne a bien assimilé votre message. A chaque étape s’assurer que la personne en face de vous a bien compris. Grace à cette technique, on visualise le chemin parcouru, étape par étape. Et on obtient l’adhésion de l’interlocuteur.
Vous recourez à un jargon martial, pourquoi ?
La vente se vit comme une bataille. C’est quelque chose de martial, par nature. On a toujours tendance à faire attention à ce qu’on achète et le vendeur a toujours tendance à «arracher» des contrats. On parle de résistance à l’achat. Tous ces mots nous renvoient aux termes d’une guerre.
Gagner une guerre est un moment d’effusion. Pourquoi rester discret sur un stand?
Justement, il faut penser à l’avenir et ne pas heurter la personne en face de vous pour perpétuer la relation commerciale. Il y a une joie démesurée, le partenaire penserait à une «arnaque».
Se faire aider par un interprète, c’est utile dites-vous ?
On se ménage deux choses en recourant à un interprète. On peut mieux réfléchir à la réponse que l’on donne et en prenant un «natif» du pays, on évite les problèmes d’interprétation qui portent à confusion parce qu’il y a des choses que l’on ne peut pas traduire dans une langue.
Repérer le décisionnaire, pour ne pas se tromper de guerre ?
Parfois les décisionnaires, par calcul tactique, se cachent. Bien les repérer pour éviter une désillusion. Le décisionnaire c’est la personne sur laquelle il faut focaliser.
Pourquoi préparer les concessions, à l’avance?
Dans toutes négociations il y a certainement des concessions. Il faut toujours donner le sentiment à votre interlocuteur que vous avez accepté de lui concéder quelque chose.
Qu’est-ce que l’écoute active, au juste ?
L’écoute doit être active. Se taire vaut parfois mieux que de prendre la parole.
Disposer des outils d’aide à la vente sur un stand, c’est élémentaire ?
Ça peut paraître élémentaire mais c’est extraordinaire le nombre de fois où les gens se ramènent encore une fois avec les mêmes catalogues négligeant les us et coutumes du pays. Avoir de catalogues avec des photos de femmes dans un pays puritain où se genre de choses n’est pas accepté.
Accepter l’objection. Comment ça facilite la vente ?
Beaucoup de gens ne sont pas prêts à l’objection. Quand l’interlocuteur soulève une objection, toute leur stratégie tombe à l’eau alors que l’objection est un élément très intéressant dans une conversation, car elle nourrit la suite de la négociation. Un bon négociateur sait utiliser une objection en sa faveur. Mettre en place un environnement de confiance est rassurant pour l’acheteur.
L’accord final peut être explicite ou implicite ?
Oui dans une négociation dans certaines cultures, l’accord verbal, la poignée de mains suffit, et on s’y tient. Dans d’autres cultures, une poignée de mains est bonne mais ne dispense pas d’un contrat en bonne et due forme.
L’accord final peut ne pas être définitif ?
Oui, encore une fois, dans certains pays, l’accord final est revisité en vue de reprendre un peu de marge.
Le spectre du “one short deal” ?
L’accord final n’est pas une raison pour parader. Ce n’est que le début d’une histoire commerciale qu’il faut pérenniser, alors il faut faire attention.
Source : WebManagerCenter
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