S’il y a un dossier sur lequel il y a un consensus au niveau de la ville de Tanger, c’est bien celui de l’assainissement solide.
En effet, tout le monde est d’accord pour qualifier de positif le retour à la normale depuis l’entrée en service de l’actuel opérateur, TecMed, en janvier 2007 en succession à Cespa Nadafa.
Cette dernière avait vu son contrat non reconduit par décision du Conseil de la ville en 2006 à cause du mécontentement galopant qui sévissait.
Le montant du marché a été de près de 80 millions de DH. Il s’agissait de financer l’acquisition de 75 camions, dont 32 bennes-tasseuses de tailles différentes, 6.300 conteneurs ainsi que des outillages divers dans les 32 secteurs qui composent la ville de Tanger.
TecMed s’était engagée à faire une collecte de 100%. Pour cela, elle a recruté plus de 740 employés à l’époque, entre ouvriers, chauffeurs et personnel d’encadrement.
Concernant Cespa Nadafa, il était temps pour cette société de partir, disaient certains à l’époque. Selon plusieurs rapports de la commission «Propreté» du Conseil de la ville de Tanger en 2006, les prestations de Cespa Nadafa avaient atteint un tel état de médiocrité que la seule issue était de «relancer la gestion déléguée».
Les lacunes relevées étaient variées: nombre insuffisant de bacs à ordures, non renouvellement des bacs cassés, horaires de ramassage aléatoires, etc.
C’est ce qui causait de nombreux désagréments, dont le plus important reste l’amoncellement des détritus à longueur de journée dans différentes rues de la ville, et même, comble de l’ironie, à quelques mètres du siège de Cespa Nadafa.
Encore plus dangereuse, selon le rapport du Conseil de la ville, est la pratique des éboueurs de Cespa Nadafa de vider dans la rue, à même le sol, les jus des bacs, les lixiviats, véritables concentrés de mauvaises odeurs et de bactéries.
Cette pratique se retrouvait même dans les grandes artères de la ville et ne se limitait pas aux ruelles secondaires.
Aujourd’hui, le contrôle de l’activité de TecMed revient à la mairie qui a mis en place des mesures de sanction en fonction de l’infraction constatée, un mécanisme auquel on n’a pas encore eu recours. Par contre, le chaos continue à l’autre bout de la chaîne.
Selon les résultats d’une étude de diagnostic de la décharge, commanditée par la GTZ (Coopération allemande), les nuisances de la décharge ne cessent de croître. En effet, autrefois située en dehors de la ville, elle est actuellement entourée d’habitations.
Selon les études de la GTZ, la décharge est aménagée de manière anarchique avec un traitement qui ne fait aucune différence entre les déchets.
La décharge dans son état actuel est présentée comme une source de pollution par les liquides qu’elle dégage (lixiviats) ainsi qu’un potentiel vecteur de maladies à travers les rongeurs qui l’habitent et le bétail qui y broute en toute liberté.
Les solutions préconisées par la GTZ démarrent par une délimitation précise du périmètre de la décharge, avec la construction d’un mur de clôture. Il s’agit aussi d’effectuer une stabilisation des pistes d’accès ainsi que la réhabilitation des équipements, actuellement dans un état vétuste.
Il est aussi question de former et de valoriser le personnel actuel de la décharge afin de le sensibiliser à ses dangers. Des actions qui n’ont pas encore été menées.
A moyen terme, le plan préconise, selon la GTZ, de mener des actions concrètes de traitement des émanations gazeuses et liquides de la décharge.
Il s’agit de mettre en place une unité de traitement des lixiviats. Dotée d’une technologie de filtration moderne, elle permettra d’épurer les liquides émanant de la décharge pour un coût d’environ 15 millions de DH.
Un système similaire est préconisé pour la captation des gaz émis par la décomposition des déchets de la décharge avec un puits de dégazage dont le coût est de 18 millions de DH.
Mais, en fin de compte, ces actions ne sont qu’un préalable à la fermeture pure et simple de cette décharge qui, en peu de temps, l’extension de la ville aidant, se trouvera au centre d’une importante urbanisation.
Le scénario préconisé par la GTZ prévoit l’étanchéité de la décharge, ainsi que son intégration paysagère avec différentes options. Le coût total de cette fermeture pourrait atteindre 45 millions de DH.
A noter que ces installations sont éligibles à un financement international dans le cadre du protocole de Kyoto, en ce qui concerne la gestion des gaz émis. Mais jusqu’à présent, aucune action concrète n’a été décidée dans ce sens.
Cespa Nadafa avait démarré en 2000 avec un cadeau empoisonné. L’ex-commune de Tanger, à l’époque, avait exigé d’elle de reprendre une partie des employés du nettoiement tout en maintenant leur statut d’employés de la commune.
Cette situation n’avait pas tardé à exploser avec des grèves à répétition et un travail accompli à la hâte. La société ne pouvait ni les licencier ni prendre des mesures disciplinaires à leur encontre.
Lors de la négociation de la gestion déléguée, c’était la solution trouvée pour rassurer les syndicats d’éboueurs. Ces derniers avaient, en effet, montré leur force en organisant des grèves qui avaient plongé littéralement la ville dans la saleté en 1999.
Source : l'Economiste
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