Les montagnes, la neige et l’abondance de rivières
sont la fierté du Liban dans une région fortement
touchée par la désertification. L’eau et le
dénivelé sont également les deux
ingrédients essentiels favorisant la production
d’électricité par voie hydraulique
(hydroélectricité).
Il fut un temps où le Liban exportait son surplus de production électrique.
Aujourd’hui, une pénurie handicape le pays et ce, malgré 18 années de paix civile.
L’Electricité Du Liban (EDL), la société étatique qui gère les ressources énergétiques du pays, est lourdement endettée et le Liban en vient même à importer l’électricité de Syrie et d’Egypte.
Cette situation aberrante, on la doit avant tout à une mauvaise gestion et un manque de dynamisme des gouvernements et responsables de l’EDL qui se sont succédés depuis la fin de la guerre.
Parmi les flops, il y a aussi cette sous-exploitation des capacités hydrauliques qu’il faut impérativement mettre au service d’une production optimale d’énergie verte et bon marché.
En effet, l’intérêt est également économique puisque selon Georges Kamar, consultant et ancien conseiller du ministre de l’Énergie et de l’Eau, le coût de production de l’électricité par voie hydraulique s’élève à 40 livres libanaises par kWh alors qu’il était de 170 livres par kWh en moyenne en 2006 pour l’électricité produite par voie thermique (pour un baril de pétrole à environ 80 dollars).
Actuellement, la capacité (puissance) totale de production électrique au Liban est de 2280 MW installés, dont seuls 1400 MW effectifs.
De cette production, la capacité hydroélectrique du Liban s’élève à 270 MW installés dont seuls 220 MW sont effectifs (chiffres datant de 2006).
Selon une étude présentée par l’ancien ministre Bassam Yammine au Conseil des ministres en juin 2005, il est possible d’augmenter la part de production hydraulique actuelle de 206 MW pour ainsi atteindre une capacité de près de 500MW dans ce secteur.
De ces 206 MW, le citoyen peut contribuer à la production de plus de 80 MW à travers la construction d’installations de petites envergures, au fil de l’eau.
Il s’agirait de micro-centrales de 10 à 500 kW de puissance (c’est-à-dire de 87.600 à 4.380.000 kWh par an) dont l’installation (ou la construction) coûterait entre 20.000 et 1 million de dollars si on considère un investissement de 2000 dollars par kW installé.
Le retour sur investissement est garanti sous les 10 ans, compte tenu du prix actuel du kWh au Liban qui dépasse en moyenne les 5 centimes de dollars.
Il est possible de connaître la puissance exploitable (en watts) d’un cours d’eau en tenant compte du débit exploité (en litres/seconde), de la hauteur de chute (en mètres) et du rendement des installations (formule simplifiée : Puissance = 7 * débit * hauteur).
Par exemple, une turbine peut produire environ 50 kW (jusque 438 000 kWh/an) à l’endroit où le débit moyen du cours d’eau est de 350 l/s et sa hauteur de chute de 20 mètres.
Sachant qu’un ménage consomme en moyenne 7000 kWh par an, une telle installation produirait de l’énergie pour environ 60 ménages.
Il serait donc intéressant que le gouvernement libanais engage une étude sur les sites potentiellement exploitables à l’échelle citoyenne, ces fameuses micro-centrales sur le fil de l’eau, afin de proposer une liste de sites intéressants accompagnés d’informations complémentaires facilitant la mise en œuvre des projets (cahiers des charges et budgets nécessaires).
Cette démarche permettrait aux propriétaires de terrains concernés de prendre conscience de leur potentiel, d’investir, voire même d’attirer aisément des investisseurs locaux potentiels.
Cependant, la solution n’est pas aussi simple qu’elle n’y paraît.
La gestion de l’eau au Liban comprend également l’approvisionnement des ménages ainsi que l’irrigation des terres agricoles qui contredisent la production électrique.
En effet, pour produire de l’électricité, les turbines ont besoin d’un débit d’eau et d’une hauteur de chute de l’eau en suffisance. Le second facteur ne pose pas problème alors que le premier contredit la consommation d’eau qui réduit ce débit… d’autant plus que l’approvisionnement souffre d’un déficit d’1 milliards de m³ d’eau par an (irrigation, utilisation domestique,etc).
Tout l’art consiste donc à concilier consommation d’eau et production hydroélectrique, même si la logique voudrait que le premier soit prioritaire sur le second.
Pour combler ce déficit d’eau tout en contribuant à une amélioration de la santé environnementale du pays, la construction de stations d’épuration des eaux à des endroits stratégiques permettrait d’abord une réutilisation de ces eaux traitées pour l’irrigation des terres agricoles.
Bien que le gouvernement libanais ait eu pour objectif de traiter 80% des eaux usées au Liban, on possède peu d’informations sur l’état d’avancement actuel de ces travaux.
Un centre de traitement des eaux usées d’une ville de 50 000 habitants, sur base d’une consommation moyenne de 150 litres par jour et par habitant, permettrait de fournir à l’irrigation des terres agricoles 2,7 millions de m³ d’eau par an, soit l’équivalent de 30% de la quantité d’eau stockée par le barrage de Chabrouh.
Cela reviendrait ainsi à irriguer plus ou moins 3 km² de surfaces agricoles par an. Malheureusement, ces usines de traitement demandent un investissement important et la plupart des municipalités seules ne peuvent y subvenir. Cependant, leur coût pour une ville de 50 000 habitants ne devrait pas dépasser les 10 millions de dollars.
Ensuite, le Dr. Fadi Comair, directeur général des ressources électriques et hydrauliques, avait établi un plan décennal en 1999 dans lequel il prévoyait la construction et l’aménagement de 27 barrages et de lacs artificiels. Cela aurait permis d’augmenter de 800 millions de m³ le stockage d’eau (et donc son utilisation) et en même temps de produire plus de 100 MW d’électricité en plus grâce à nos ressources hydrauliques.
Malheureusement, fautes de moyens et de volonté politique ce plan n’a pas reçu l’attention qu’il méritait et aujourd’hui, seuls 20% des constructions prévues ont été réalisées (The Daily Star, August 20, 2007, « Experts, officials say lebanon likely to face severe shortages as early as 2010 »).
La construction du barrage de Chabrouh (destiné à stocker 8 millions de m³ d’eau par an, soit 1% des objectifs totaux du plan décennal), sur les hauteurs du Kesrouan, a abouti à la fin de l’été 2007 et, malgré certains problèmes d’approvisionnement, se trouve être le seul ouvrage réalisé dans le cadre de ce plan.
Cinq autres barrages sont en cours de construction. En tout, seuls 80 millions de dollars ont été débloqués sur le milliard initialement prévu.
En novembre dernier, les ministres Alain Tabourian (Energie et Eau) et Mohamad Chatah (Finances) ont conclu un accord sur le financement pour l’année 2009 de 10 des 27 barrages et lacs prévus par le plan décennal.
Puisse ce gouvernement préparer, voire accélérer, la mise en place complète de ce plan.
Le redressement du pays passe par son auto-suffisance en eau et son indépendance énergétique.
Source : Libnanews
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