La Tunisie a ouvert un nouveau marché prometteur en adhérant à l'accord de libre-échange avec l'Union Européenne, mais certains dirigeants d'entrepr...
La Tunisie a ouvert un nouveau marché prometteur en adhérant à l'accord de libre-échange avec l'Union Européenne, mais certains dirigeants d'entreprises et responsables politiques mettent en garde sur le fait que sans mesures de protection et de modernisation, le fossé économique existant entre la Tunisie et l'Union, loin de se combler, pourrait se creuser.
Les dernières barrières douanières restantes entre la Tunisie et l'Union Européenne ont été levées lorsque l'accord de libre-échange est entré en vigueur le 1er janvier, mais l'opinion publique tunisienne reste assez mitigée sur cette nouvelle mesure.
Soulignant que la Tunisie est le premier pays du sud de la Méditerranée à mettre en place une zone de libre-échange avec l'Union Européenne, le secrétaire général de l'Association des Chefs d'Entreprises Hedi Jilani a indiqué que le pays avait franchi une nouvelle étape "pleine de défis et riche en promesses et en ambitions".
Toutefois, d'autres chefs d'entreprises et responsables politiques ne partagent pas cet optimisme. Moncef Mouallehi, PDG d'une entreprise privée, a déclaré à Magharebia que "cet accord se fera au détriment du marché du travail en Tunisie, et le nombre de personnes sans emploi augmentera". M. Mouallehi ajoute : "Les consommateurs tunisiens rechercheront des produits étrangers et se détourneront des produits locaux."
Le Parti d'Union Démocratique renchérit, expliquant que cet accord ne servira qu'à élargir le fossé économique entre la Tunisie et l'Union Européenne. Dans un éditorial, le quotidien de ce parti d'opposition avertit :
"Cette situation ne bénéficie pas… aux produits tunisiens", ajoutant que "en l'absence de protections, la Tunisie et les pays similaires se contenteront d'être des marchés de consommation des produits de la machine industrielle européenne dès lors que les citoyens auront les moyens et le pouvoir d'achat."
Il aurait été plus prudent qu'un accord de libre-échange "au niveau des pays du Maghreb arabe ou de la région arabe" précède ce partenariat avec l'Union Européenne, affirme ce parti. Cet accord avec l'Europe aurait alors "concerné la région dans son ensemble [et assuré] de bien meilleures conditions de négociation."
La zone de libre-échange entre la Tunisie et l'Union est une "arme à double tranchant", explique la directrice du Centre des Jeunes Dirigeants, Monia Jeguirim Essaidi. Les entreprises tunisiennes pourront désormais assurer une promotion efficace de leurs produits en Europe, mais à la seule condition qu'elles modernisent leur outils et leurs processus de production.
Si les entreprises tunisiennes "continuent d'appliquer leurs méthodes traditionnelles et obsolètes", a expliqué Mme Essaidi à Magharebia, "elles pérécliteront et disparaîtront ; ce qui entraînerait de plus grandes difficultés sur le marché de l'emploi et les conditions économiques en général".
Selon des sources bien informées s'adressant à Magharebia sous le couvert de l'anonymat, les autorités tunisiennes pourraient envisager d'augmenter la taxe à la consommation. En échange, les consommateurs tunisiens auraient un plus large choix sur le marché local, en particulier pour les produits industriels et les appareils électroménagers.
Cela forcerait les fabricants locaux à améliorer la qualité de leurs produits et à les proposer à des prix plus compétitifs.
Les experts économiques affirment que pour renforcer son intégration économique et commerciale dans la sphère euro-méditerranéenne, la Tunisie tentera également de bénéficier des accords bilatéraux de libre-échange signés avec le Maroc, la Jordanie, la Turquie, l'Association Européenne de Libre Echange (Norvège, Suisse et Islande) et l'Accord d'Agadir signé avec le Maroc, l'Egypte et la Jordanie.
S'y ajoute la ratification du protocole Pan-Euro-Méditerranéen sur les règles d'origine. La Tunisie est face à une date importante définie par la Déclaration de Barcelone, qui vise à mettre en place une zone de libre échange euro-méditerranéenne à l'horizon 2010. Elle ouvrirait une zone de plus de 700 millions de consommateurs.
Les négociations sont encore en cours concernant les produits agricoles dans le cadre du nouvel accord de libre-échange avec l'Union Européenne.
Source : Magharébia
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