La compagnie nationale
Air Algérie est sommée de se plier au système communautaire d’échange
de quotas d’émission de gaz à effet de serre et ce, sous peine de se
voir exclue de l’espace aérien européen.
Il ne s’agit pas
d’avertissements, mais plutôt d’obligation en vertu de la directive
européenne de 2008/101/CE, qui intègre les activités aériennes dans le
système communautaire d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de
serre.
Air Algérie, semble-t-il, n’était pas du tout préparée à ce type
de restriction, voire en complète ignorance de ce processus qu’elle
récuse complètement.
“Pot de fer contre pot de terre”, ira jusqu’à dire
Wahid Bouabdallah, P-DG d’Air Algérie, pour signifier sa
“vulnérabilité” puisqu’elle se retrouve obligée de s’y plier sous peine
de se retrouver interdite de vol dans l’espace européen.
Une
possibilité à écarter inéluctablement pour la simple raison que 80% des
dessertes de notre pavillon national sont en direction de ce continent.
La
compagnie peut aussi se voir privée du crédit carbone dont elle
bénéficie actuellement. Plus grave encore, Air Algérie est tenue par la
date butoir du 31 août prochain de présenter à l’aviation civile
française un plan de suivi de ses émissions de CO2, et c’est loin
d’être une tâche facile.
“Nous avons été les premiers à initier
une démarche de protesta au niveau arabe et africain, pour ce qui est
des transporteurs aériens, et nous avons été entendus”, a déclaré
M.
Bouabdallah, indiquant qu’une rencontre se tiendra incessamment à Alger
pour examiner la question, car il s’agit d’un préjudice considérable
qu’auront à subir les compagnies aériennes non européennes.
Air
Algérie, pour sa part, consciente des enjeux et surtout des devoirs de
chaque pays sur le plan environnemental et cadre de vie, raison pour
laquelle la compagnie a fourni un effort considérable au niveau de sa
flotte, remet en cause une décision qu’elle estime être prise de
manière “unilatérale”.
“Actuellement, des négociations sont en cours au
niveau de l'État et de l'OAIC qui dénoncent également cette décision et
refusent cette approche”, précise M. Bouabdallah qui décide alors de
prendre le taureau par les cornes pour “tirer”, selon ses propres
termes, “la sonnette d’alarme” et dénoncer ladite instruction, à plus
forte raison que l’Algérie n’a pas d’engagement de réduction des
émissions, du moins jusqu’à 2012.
“Il fallait d’abord bénéficier du
temps de s’organiser autour d’un marché local de carbone et d’une
autorité de régulation qui n’existe pas en Algérie”, a déclaré M.
Bouabdallah qui ne pouvait pas choisir meilleure tribune que cette
rencontre pour se faire entendre de tous et même des autorités
algériennes.
Et du coup, ce qui avait l’air d’un séminaire technique
complètement barbant, hormis pour les initiés, s’est transformé vers la
fin en véritable coup d’éclat soufflant le vent de la protesta.
Le
séminaire portant sur “le réchauffement climatique, le marché mondial
du carbone et l’inclusion du secteur aérien dans le marché européen du
carbone” a été organisé hier par Air Algérie au Cercle national de
l’Armée, en présence de représentants de plusieurs départements
ministériels, en plus de chefs d’entreprise et autres spécialistes du
domaine.
Ces derniers ont exprimé aussi bien leur avis scientifique,
que leur désapprobation politique sur ce qu’ils ont estimé comme “un
devoir” envers la Terre, mais dont les mécanismes restent encore à
définir.
Les négociations elles-mêmes n’ont pas connu d’épilogue et
n’ont même pas trouvé de consensus notamment face aux États-Unis qui
prennent part au débat, mais refusent de s’engager et encore moins de
ratifier le protocole de Kyoto.
Ceci ne les empêche pas de préparer une
loi fédérale qui va plafonner leur niveau d’émission et constituer un
marché de carbone nord-américain, qui inclurait probablement le Canada
tant les enjeux qui en découleraient sont énormes.
L’Algérie est complètement en dehors de la Finance carbone
Certes,
il est difficile de comprendre le raisonnement aussi bien de l’État
algérien que ses industriels qui, jusque-là, ont préféré ignorer, à
tort ou à raison, le marché du carbone et ce qu’il génère comme crédit
contrairement, à titre d’exemple, à nos voisins marocains.
Ces derniers
n’ont pas manqué de saisir les opportunités, alors qu’ils sont loin de
disposer des potentialités algériennes. Le marché du pétrole, qui se
compte pourtant à des dizaines de milliards d’euros et point de carbone
(référence en la matière), confirme une tendance à la hausse avec le
prix de la tonne qui pourrait valoir 50 euros ou plus en 2020.
L’Algérie,
qui a ratifié le protocole de Kyoto et a été même à l’initiative de
l’offensive africaine à Poznan en guise de préparation de la rencontre
de Copenhague, n’exploite pas ses ressources naturelles comme elle
devrait le faire.
Quoiqu’il en soit, le marché du carbone, qui a
connu une évolution, mutant d’un marché primaire en marché secondaire,
se décline en deux périodes dont l’une prend fin en 2012 et la seconde
en 2020.
Source : Liberté