La stratégie de l’Office chérifien des phosphates (OCP) est claire:
développer une capacité de production flexible pouvant s’adapter
rapidement à la nature et au rythme du marché. Le programme
d’investissement, 2009-2015, d’un montant de 4 milliards de dollars,
soit environ 32 milliards de DH, et sa politique achats envers ses
fournisseurs étrangers, associant leurs sous-traitants marocains, fera
le reste.
En juin dernier, dans le cadre de sa politique de soutien
aux PME marocaines, baptisée Business Opportunities PME, le phosphatier
avait réuni les cadres du ministère de l’Industrie, de la Confédération
générale des entreprises du Maroc (CGEM), de l’ANMPE, de la Banque
Populaire ainsi que des fournisseurs étrangers et des centaines de
dirigeants de PME marocaines pour dévoiler ses projets de développement
sur les six prochaines années.
Au-delà de cette démarche, l’OCP
entend offrir à ces PME un espace de rencontres pour tisser des
partenariats avec des leaders mondiaux de l’équipement et de
l’ingénierie dans les secteurs industriels et les faire bénéficier
d’offres d’accompagnement et de financement adaptées. Offres concoctées
par le ministère de l’Industrie, la CGEM, l’ANPME et la Banque
Populaire. Objectif: booster les PME marocaines pour répondre au mieux
aux attentes des fournisseurs étrangers de l’OCP, devant réaliser une
partie de ses projets en cours ou dans le pipe.
En effet, la
stratégie prévoit d’importants projets industriels sur les principaux
sites d’activité de l’OCP: Khouribga, Youssoufia, Benguérir, Safi et
Jorf Lasfar. Il s’agit d’infrastructures portuaires, des pipelines de
transport des phosphates, de dessalement d’eau de mer, d’unités
chimiques de production d’acide sulfurique, d’acide phosphorique et
d’engrais, de laveries des phosphates, de stations d’épuration des eaux
usées…).
Des marchés qui dépassent de loin les capacités techniques et
financières des entreprises marocaines.
Et surtout les PME. C’est en
cela que la stratégie Business Opportunities PME est pertinente. L’OCP
a opté pour une réalisation en lots séparés. Ce qui permet aux
entreprises marocaines d’y participer aux côtés de ces grands
fournisseurs étrangers. Cette nouvelle approche est appuyée par la
refonte du système et process Achats du Groupe, pour renforcer, dit-on,
la réactivité et l’exécution du programme d’investissement.
L’OCP
a également initié une série de projets de développement
socioéconomique, culturel et sportif à Khouribga pour donner un nouvel
élan à la dynamique que connaît la cité des phosphates. Des projets en
droite ligne avec la stratégie globale, adoptée par l’Office sur la
base d’études expertes. Les grandes lignes de cette stratégie visent à
accroître la valeur ajoutée et la rentabilité des phosphates et à
accorder davantage d’intérêt à la gestion des ressources humaines.
Pour
la mise à niveau de la province de Khouribga, l’Office a consacré un
budget de plus de 33 millions de DH pour le financement de quelque 457
projets à Khouribga, Oued Zem, Boujniba et Hatan durant la période
2007-2010.
Le chantier de l’usine Merah Al Ahrach suit son cours.
Cette unité de traitement et d’amélioration de la qualité des
phosphates, dont la production annuelle devrait atteindre 7,2 millions
de tonnes en mars 2010 avant de passer à quelque 12 millions de tonnes
deux ans plus tard. Le montant de l’investissement a atteint 2,5
milliards de DH.
A terme, cette unité débarrassera la ville de
Khouribga de 5 millions de m3 d’eaux usées par an. Eaux qui seront
traitées avant d’être réutilisées pour le lavage des phosphates. Il est
également prévu de mettre en place, entre janvier 2010 et décembre
2011, une autre usine dédiée au traitement des phosphates extraits des
mines de Lahlassa et de Sidi Chanan. Sa capacité de production est
estimée à 12 millions de tonnes.
A l’instar des laveries de Sidi
Dawi et de Youssoufia, celles de Merah Al Ahrach et d’Ouled Fares
faciliteront le transfert des phosphates via le mode slury pipe, à
partir de Khouribga vers l’unité chimique de Jorf Lasfar située à
quelque 225 km. Ce qui nécessitera un investissement de près de 3
milliards de DH.
Autre lieu, autre projet. La construction de
l’usine Ouled Fares, sur la route de la commune Al Foukara.
La première
tranche sera exploitée début 2015 pour une capacité de production
estimée à 6 millions de tonnes/an, qui devrait passer à 14 millions dès
2018.
Dans le pipe également, l’exploitation d’une nouvelle mine
dont le début des travaux est fixé à 2016. Elle couvrira une superficie
de 1.800 ha pour une production moyenne de 7 tonnes/m2, sur une durée
d’un peu plus de 20 ans. Par ailleurs, l’OCP a réservé une enveloppe
budgétaire de 1,5 milliard de DH au projet d’aménagement «Mine Verte»,
composé d’un complexe socioculturel, d’un complexe résidentiel et
touristique et de terrains de sport.
Un musée de la mine est en cours
de création pour, dit-on, «encourager le tourisme scientifique». Pour
cela, une réserve forestière a été mise en place près des sites miniers
pour «inciter au tourisme écologique».
Uranium
En
marge de la visite au Maroc, en 2007, du président français, Nicolas
Sarkozy, la présidente du directoire d’Areva, Anne Lauvergeon, a signé
avec Mostafa Terrab, le président de l’OCP, une déclaration d’intention
qui porte sur l’extraction de l’uranium de l’acide phosphatique.
L’objectif est de lancer en commun une étude de faisabilité pour un
site industriel de production d’uranium à partir des phosphates.
D’autant plus qu’une étude de l’Agence internationale de l’énergie
atomique (AIEA) estime que la quantité d’uranium que l’on pourrait
extraire des phosphates du Maroc avoisine 6 millions de tonnes.
A noter
également que la Russie s’intéresse au nucléaire marocain. Elle compte
construire une centrale nucléaire fonctionnant au phosphate par la
société russe Atomstroyexport, sur le site de Sidi Boulbra, qui
produira 1.200 MW. Pour porter ce projet, les Russes prévoient d’y
ériger un institut d’engineering atomique.
· Eau: Anticiper les risques
La
stratégie dite de l’eau porte globalement sur la politique des
pipelines, de stockage des boues de lavage et de la mise en place de
stations d’épuration et de dessalement d’eau de mer. Stratégie qui
répond à la volonté de l’OCP de minimiser et anticiper les risques
majeurs pour réduire les effets nocifs du traitement des phosphates.
Mais aussi, faire des économies de matières premières, d’énergie et
d’eau tout en rejetant le minimum de déchets ou en les valorisant. «La
gestion optimisée de l’eau a toujours été une préoccupation pour
l’Office afin de diminuer la pression sur les ressources aquatiques
naturelles». L’objectif étant d’arriver à un bilan positif.
· Pipelines: Des économies d’abord
Le
pipeline permettra une gestion optimisée qui évite le séchage à la mine
(soit une économie de près de 30 DH par tonne ou 300 millions/an et une
diminution de la pollution associée à cette consommation d’énergie) et
de passer de 12% d’humidité à 40% dans le pipeline et à 60% dans le
procédé chimique.
· Stockage des boues de lavage
L’OCP
a aménagé des bassins sur de grandes superficies afin de stocker les
boues à proximité des laveries. La distribution est assurée par
écoulement naturel et après un stockage de la boue à tour de rôle dans
chaque bassin, il y a décantation puis récupération de près de 2,4
millions de m3 par an.
· Développer les stations d’épuration
Il
s’agit d’investir dans des stations de traitement des eaux usées des
villes où le groupe est présent. Des eaux qui seront utilisées pour le
lavage des phosphates et l’arrosage des espaces verts. Ce qui réduit le
recours aux eaux brutes. La station de Khouribga (en cours de
réalisation en collaboration avec l’Onep, devenu depuis le regroupement
avec l’Office de l’électricité, ONEE) permettra ainsi la réutilisation
des eaux usées épurées, soit 5 millions de m3 par an. Deux autres
projets sont à l’étude à Youssoufia et Benguerir.
· Dessalement pour préparer l’avenir
L’expérience
remonte déjà à 1970, à Laâyoune où le groupe utilisait des procédés de
distillation pour dessaler l’eau de mer. A partir de 2005 c’est le
procédé membranaire (osmose inverse) qui a été mis en place car moins
énergivore. La station produit actuellement près de 1,5 million de m3
d’eau par an. Dans le cadre de la nouvelle plateforme chimique à Jorf
Lasfar et Safi, il est prévu de récupérer l’énergie issue de ce procédé
pour dessaler l’eau de mer. A terme ce sont 100 millions de m3 d’eau
potable qui vont être produits annuellement.
Source : l'Economiste