Gassi Touil et
Medgaz sont deux projets de taille inscrits dans les perspectives du
groupe Sonatrach. Ce sont deux projets que la Compagnie nationale des
hydrocarbures devait monter en partenariat avec les Espagnols. Ils
n'avancent cependand pas comme le souhaitait la partie algérienne. Gros
plan sur deux projets émaillés de difficultés.
Le
groupe Sonatrach s'était allié au consortium Repsol-Gas Natural sur le
projet gazier Gassi Touil. C'était en 2004. Et c'était de manière
emphatique.
Sonatrach
y était liée par un contrat de partage de production, dans le cadre de
l'ancienne loi sur les hydrocarbures. Gassi Touil a été mis en
compétition par avis d'appel d'offres international. Les termes du
contrat, résilié aujourd'hui par Sonatrach, prévoyaient de forer
cinquante-deux puits de développement, d'en reprendre seize existants,
de construire des installations de surface pour le traitement de
vingt-deux millions de mètres cubes par jour de gaz brut, de mettre en
place de nouvelles capacités de transport de 6,5 milliards de mètres
cubes par an de gaz de vente.
Et,
de construire, enfin, une nouvelle usine de liquéfaction d'une capacité
nominale de quatre millions de tonnes par an. Ce gros contrat, les
Espagnols l'ont décroché à l'issue de l'ouverture publique des plis des
compagnies ayant soumissionné pour ce projet. Le consortium ibérique
avait fait mieux que ses concurrents que furent Total, Anadarko et
BP
dans cette compétition. Par ce projet, Repsol et Gas Natural
s'attachaient à consolider leur position sur le marché national des
hydrocarbures.
Dans
un communiqué qu'elle a rendu public après l'annulation de ce contrat,
Sonatrach a souligné : c'est un «fiasco industriel majeur». Elle a par
ailleurs annoncé une procédure d'arbitrage pour demander la «réparation
du dommage substantiel qu'elle a subi en raison de l'inexécution par
Repsol et Gas Natural de leurs obligations contractuelles». Il est
cependant fort probable que les choses ne vont pas en rester là.
La
résiliation de ce contrat intervient quelques semaines après le
règlement de la crise du Medgaz, un projet dans lequel Sonatrach est
actionnaire majoritaire. La part de Sonatrach a atteint 36%, et ce, en
fonction des quantités de gaz achetées par chaque partenaire dans le
projet. Avec le retrait de Total et de BP, la configuration des
actionnaires de Medgaz a été modifiée. Total et le britannique BP
détenaient 12% chacun dans le consortium qui dirige Medgaz.
Au
départ, il était composé de Sonatrach (20% du capital), des groupes
espagnols Cepsa (20%), Endesa (12%) et Iberbola (12%), des français GDF
(12%) et Total (12%) et du britannique BP (12%). Medgaz reliera début
2009, Béni-Saf à Almeria (Espagne). Il aura une capacité de 8 à 10
milliards de m3/an, extensible à 16 milliards de m3/an pour pouvoir
acheminer le gaz vers le reste de l'Europe. La majoration de la part de
Sonatrach dans le Medgaz n'a pas été sans difficultés. La compagnie
nationale des hydrocarbures avait même menacé de se retirer, dans une
conjoncture qui lui était favorable. Et elle l'est encore.
Même
si une solution a été trouvée, il faut dire que la conjoncture gazière
joue en faveur de Sonatrach. Comment ? Le marché du GNL est en plein
essor et l'Europe du Sud, l'Espagne en tête, ne s'offre pas réellement
de choix pour s'approvisionner en gaz dans un contexte marqué par des
tensions énergétiques entre l'Europe des Vingt Cinq et la Russie.
Crédible, l'Algérie restera le principal fournisseur de gaz pour
l'Europe, au moins pour les vingt prochaines années. L'UE a libéralisé
le marché gazier, mais dans des conditions discutables, voire
critiquables. Dans une de ses déclarations, le président-directeur
général de Sonatrach, a évoqué cette problématique.
Il
souligne : la façon dont a commencé la libéralisation du marché gazier
européen a montré qu'il y a des processus que l'on «ne peut pas forcer»
et qu'elle a enseigné que, la recherche de solutions «immédiates et
unilatérales» à l'incontournable libéralisation des marchés a fait
courir le risque aux pays consommateurs de mettre «en péril le principe
vital de la sécurité des approvisionnements».
Mohamed
Meziane rappelle à plusieurs occasions les problèmes qu'ont connu les
«contrats à long terme et la clause de destination». Il parle souvent
d'une «sorte de protectionnisme» opposé aux producteurs quant à leur
entrée, en tant qu'acheteur à part entière, sur un marché gazier
européen réputé pourtant «ouvert et dérégulé partout». Il estime que
«la situation faite au gazoduc Medgaz» est, à cet égard,
«inacceptable», au regard de la sécurité des approvisionnements comme
au regard de la sécurité du marché. Au sujet de Medgaz, toujours, des
spécialistes ont fortement critiqué les conditions imposées à Sonatrach
par la commission nationale espagnole de l'énergie (CNE), organisme
régulateur du secteur de l'énergie en Espagne.
Ils
l'ont incitée toutefois à «changer de position» concernant la demande
de l'Algérie d'augmenter sa participation dans le projet Medgaz. Ils
notent que la CNE doit changer de position quant aux conditions qu'elle
a imposées à Sonatrach pour le relèvement de son capital, de 20 à 36%,
dans le projet du gazoduc Medgaz. Et, dans ces conditions, l'Algérie ne
peut exporter qu'un milliard de mètres cubes de gaz dans le cadre du
projet Medgaz. C'est inamical de la part des autorités espagnoles. En
théorie, l'Algérie doit être autorisée à commercialiser trois milliards
de mètres cubes, en fonction de la part des actions qui lui reviennent
dans le Medgaz. Il faut rappeler que la construction de ce gazoduc a
été confiée à cinq entreprises multinationales. Il s'agit des
entreprises japonaises Mitsui et Sumitomo, de la britannique Rolls
Royce, de l'italienne Saipem et du consortium hispano-français Tecnicas
Reunidas-Amec Spie.
Ce
pipe, c'est un investissement de neuf cent millions d'euros. Les
travaux, qui ont déjà commencé en Algérie, doivent s'accélérer au cours
de cette année, avec la construction du tronçon sous-marin du gazoduc,
long de deux cents kilomètres. Les compagnies susmentionnées,
spécialisées dans ce type d'infrastructures, emploient les technologies
les plus avancées et ont acquis une vaste expérience dans des projets
similaires. Mitsui et Sumitomo fourniront les 226 km de tuyaux en acier
au carbone à haute résistance du gazoduc. Rolls Royce fabriquera et
installera les trois compresseurs de la station qui élèveront la
pression du gaz depuis la côte algérienne afin d'assurer sa traversée
jusqu'en Espagne via la Méditerranée.
La
pose du tronçon sous-marin sera effectuée par l'entreprise italienne
Saipem, et la station de compression ainsi que le terminal de réception
en Espagne seront réalisés par le consortium hispano-français Técnicas
Reunidas-Amec Spie. Medgaz, projet grandiose, permettrait, à priori, de
renforcer le bilatéral entre l'Algérie et l'Espagne et d'introduire
plus de fluidité dans les approvisionnements gaziers dans l'Europe.
Source : allAfrica