Sur les
12 300 lots que comptent les
zones industrielles au
Maroc, à peine 6
500 sont
opérationnels, 800 ne trouvent pas encore
preneur et 5 000
sont attribués mais non jamais été
valorisés.
Réhabilitation des zones,
cahier des
charges plus restrictif, plusieurs mesures ont été prises, mais le
problème reste complexe.
Paradoxal ! Alors que le foncier est
fréquemment avancé par les opérateurs économiques comme un des freins
majeurs à l’investissement, il y a aujourd’hui près de 5 800 lots
industriels qui sont en souffrance à travers les différentes zones
industrielles du pays.
Et ce n’est pas un problème de demande puisque
sur ces 5 800 lots, 800 lots seulement n’arrivent pas à trouver preneur
alors que
5 000 ont été achetés mais n’ont jamais été exploités à ce jour.
Ce
sont là les derniers chiffres obtenus auprès de la direction de la
planification et des études du ministère de l’industrie et du commerce
relatifs au programme de réhabilitation des zones industrielles dites
d’ancienne génération.
Ces zones, plus d’une soixantaine, sont situées
dans 33 villes et comprenaient au départ près de 12300 lots, le tout
sur une superficie totale de 4 460 hectares. A ce jour, sur les 6 470
lots vendus ou attribués, 5 120 abritent déjà des unités de production
tandis que 1 351 sont toujours en cours de construction. Au final,
selon le recensement du ministère, le taux de valorisation des terrains
industriels se situe aux alentours de 53%.
Ce qui est à peine plus élevé que son niveau d’il y a quatre ans. En
2005, en effet, sur 10 800 lots industriels attribués, seuls 3400
étaient opérationnels et 1300 en cours de construction contre 6 000 qui
étaient tout simplement inexploités.
Aujourd’hui, le phénomène
touche aussi bien les grandes villes que les petites. A Agadir, par
exemple, on dénombre 765 lots industriels qui sont inexploités par
leurs attributaires. A Casablanca et Fès, on en recense respectivement
579 et 572 parcelles. On en trouve également 248 à Tanger, 392 à
Marrakech et 196 à Meknès.
Dans les petites villes, la situation n’est
guère meilleure. Le cas le plus typique est celui de la zone
industrielle de Kelaât Sraghna où, sur un total de 715 lots attribués,
seule une centaine est aujourd’hui valorisée.
10 ans de tentatives qui se sont soldées par de maigres résultatsDepuis
quelques années, et plus particulièrement depuis le lancement du pacte
d’émergence industrielle par le gouvernement, il y a un an, les
pouvoirs publics suivent de très près le dossier, sans parvenir à
trouver une solution qui fasse l’unanimité.
Et ce n’est pas faute
d’avoir essayé, car, en réalité, on tente depuis presque 10 ans de
lutter contre ce fléau sans résultat. Successivement en 2000 puis en
2004, des commissions interministérielles avaient été installées pour
assainir la situation.
Parallèlement, des circulaires avaient été
adressées aux gouverneurs et walis les invitant tour à tour à recenser
puis essayer de récupérer les lots non valorisés si possible.
Cependant, comme l’explique une source à la direction, «il n’est pas
toujours facile de récupérer un lot surtout si, entretemps, son
attributaire a pris le soin de l’immatriculer en son nom auprès des
services de la conservation foncière». C’est ce qui explique, en grande
partie, l’absence de résultats depuis toutes ces années.
Mais au
ministère on ne perd pas espoir pour autant. L’effort continue mais
cette fois-ci en y mettant plus de rigueur. C’es ainsi qu’un fonds de
100 MDH a été alloué en 2008 à la réhabilitation des zones
industrielles. Il s’agit, certes, d’un programme lancé depuis 1998 sauf
que l’Etat n’y a pas toujours mis les moyens nécessaires.
Pourquoi
la réhabilitation ? Parce que, reconnaît-on au ministère, «un nombre
important de zones industrielles datant des années 80 et début 90
souffrait d’un gros problème de détérioration des équipements.
Plusieurs opérateurs mettent en avant le manque d’équipements comme
principale raison de la non-valorisation de leur terrain. Parfois à
raison, parfois à tort».
80% des zones délabrées aujourd’hui réhabilitéesPour
supprimer cet alibi, l’Etat a donc décidé de remplir rapidement sa part
du contrat. Aujourd’hui, ce sont 1 875 hectares de zones industrielles,
soit 80% de la superficie à réhabiliter, qui ont bénéficié de ce
programme, notamment les trois zones de Sidi Bernoussi, Moulay Rachid
et Dar Bouazza dans la région de Casablanca, les zones de Taqadoum et
Tabriquet à Rabat et Salé ou encore le célèbre quartier industriel
Bensouda de Fès.
La réhabilitation se fait selon quatre critères précis
: l’impact socio-économique du projet sur la région, le niveau de
valorisation de l’espace industriel concerné, l’existence d’une
association d’industriels et enfin l’implication financière des
partenaires tant publics que privés.
Lancé en 1998, ce programme n’est
pas encore bouclé puisque la réhabilitation de 485 hectares est
aujourd’hui en projet dans six villes du Royaume, notamment Rabat, El
Jadida, Kénitra, Safi,Tanger et Oujda.
Mais même avec cela, on
s’en doute, le problème du manque de valorisation ne serait pas résolu.
Et c’est ce qui avait décidé les pouvoirs publics à envisager, en
parallèle, d’autres mesures plus draconiennes. De fait, explique la
direction de la planification et des études, théoriquement, un
opérateur qui prend un terrain industriel dispose de 36 mois pour
réaliser l’intégralité de l’investissement projeté.
12 mois après
l’attribution, si les travaux n’ont pas été entamés, des pénalités sont
exigées, et si au bout de 24 mois rien n’est fait, le lot peut être
légalement retiré.
Ces conditions n’ayant pas été respectées, l’Etat
est aujourd’hui devenu plus rigoureux dans le suivi de la valorisation
des terrains industriels. Ainsi, les développeurs-aménageurs de projets
d’espaces industriels sont tenus de rendre compte de l’état
d’avancement de l’attribution et du niveau de valorisation dès
l’enclenchement de la commercialisation des terrains et, surtout, de
procéder à la récupération des lots non valorisés dans les délais fixés
par les cahiers des charges.
Les développeurs sont également tenus de
communiquer chaque trimestre au ministère et aux autorités locales
l’état des lots attribués, ceux non valorisés et ceux disponibles de
manière à pouvoir les proposer à d’autres investisseurs.
Malgré
tout, la récupération des lots, bien qu’envisagée, reste difficile à
mettre en œuvre pour plusieurs raisons. En plus de la complexité de la
procédure d’expropriation, en cas de terrains déjà immatriculés à la
conservation foncière, les commissions locales sont souvent confrontées
à des problèmes inhérents à l’identité des personnes attributaires.
Il
est souvent difficile, en effet, pour ne pas dire impossible, de
demander à un gros opérateur économique, ayant des relations, à un
notable d’une petite localité, un député, un président ou un agent
d’autorité de restituer un terrain dont il est attributaire directement
ou indirectement par le biais de proches. Le ministère de l’industrie
et du commerce n’a finalement d’autres choix que de gérer au mieux ce
lourd héritage du passé.
Histoire : 30 ans pour trouver la bonne formuleAvant
1980, la notion de zone industrielle dédiée n’existait pas en tant que
telle au Maroc. Les quartiers industriels se développaient souvent à
côté -ou à partir- de quartiers résidentiels sans aucune planification
préalable, donnant souvent lieu à des zones sans équipements ni
infrastructures.
Il a fallu attendre 1980 pour que le Maroc se dote
d’un Plan national d’aménagement des zones industrielles (PNAZI) qui
était le premier pas vers une valorisation plus professionnelle des
terrains industriels. Ce plan est resté en vigueur jusqu’en 1995, année
à partir de laquelle l’Etat a changé d’approche en faisant appel à des
partenaires comme les collectivités locales et les Chambres
professionnelles.
En 1998, devant le délabrement inquiétant de la
majorité des sites, les pouvoirs publics n’eurent d’autre choix que de
lancer un programme national de réhabilitation des zones industrielles.
A ce jour, ce programme a permis de mettre à niveau 16 zones dans 13
villes pour une superficie globale de 1 875 hectares.
Dans la foulée,
l’Etat a enclenché entre 2000 et 2004 deux opérations pour tenter de
récupérer les lots attribués mais restés inexploités. Sans grands
résultats. Depuis 2009, avec l’avènement du pacte national d’émergence
industrielle, on ne parle plus de zones industrielles mais de
plateformes industrielles intégrées (P2I).
En tout, le programme porte
sur 23 sites dont 6 pour l’offshoring, 2 pour l’automobile, une pour
l’aéronautique et 8 pour l’agroalimentaire et les produits de la mer et
une superficie totale de pas moins de 2 600 hectares.
Avantage de ces
P2I, pour des PME le terrain est uniquement loué et non cédé, pour les
grosses entreprises, il est d’abord loué avant d’être cédé, à
l’achèvement des travaux. Enfin, il existe aussi des offres, clés en
main, basées sur la proposition de locaux modulables.
Source : FesPub