Le Pdg de Tunisair se
prépare à la concurrence de l'open sky qui entrera en vigueur dès 2010
en affinant sa productivité. La crainte principale concerne les
low-cost. Tunisair y répond avec le service et en ouvrant notamment une
classe business.
Nabil Chettaoui : Notre stratégie commerciale est tournée vers la rentabilité depuis trois ans. Nous abandonnons donc toutes les destinations déficitaires ou non stratégiques. C'est ce que nous avons fait en fermant les lignes de l'Europe de l'Est sur lesquelles nous perdions beaucoup d'argent comme la Pologne ou la Slovaquie.
Nous recentrons aussi nos activités sur les vols réguliers aux dépens des charters. Tunisair est ainsi passée de 50% de vols réguliers et 50% de charters à 60/40. Nous allons continuer dans cet effort pour atteindre les 2/3 et 1/3. L'activité charter doit être rentable et se dérouler sur toute l'année.
Nabil Chettaoui : Nous sentons la crise avec un décalage par rapport à l'Europe, donc seulement depuis avril ou mai 2009. Ceci veut dire que nous allons la subir avec le même impact et la même durée. S'il y a reprise, nous subirons aussi le même décalage.
Nous répondons par une compression des coûts qui commence par une campagne de sensibilisation de notre personnel, avec la constitution d'un groupe de travail chargé de rechercher les niches de gain et les postes où des économies sont possibles.
L'objectif est d'améliorer la productivité globale de la compagnie. Il n'y aura pas de réduction de postes, mais sans doute un gel des embauche et une demande de plus de productivité de la part du personnel.
"La concurrence, nous connaissons"
Nabil Chettaoui : Si la reprise est au rendez-vous en 2010, la décision d'ouvrir de nouvelles lignes sera opportune. Nous avons déjà signé l'avancement de la livraison pour deux A320 qui devraient entrer dans notre flotte en avril 2010 et avril 2011. Nous sommes même en pourparlers pour avancer deux A330 d'un an et demi.
En 2012, dès réception de ces derniers appareils, nous envisageons d'ouvrir un Tunis-Montréal, puis New-York. Dans un second temps, nous pensons à une ville chinoise, Pékin ou Shanghai.
Econostrum.info : Comment vous préparez-vous à la concurrence qui va naître de l'ouverture du ciel tunisien en 2010 ?
Nabil Chettaoui : La Tunisie a été pionnière au niveau du tourisme dans les années 60 avec la liberté donnée aux vols charters d'opérer. Donc Tunisair a toujours été agressive avec les charters. La concurrence, nous connaissons.
"Pour survivre, il faudra de la valeur ajoutée"
Nabil Chettaoui : Il est vrai que nous avons été complètement épargnés par l'arrivée des low-cost en Europe. Le gouvernement tunisien a voulu ouvrir aux low-cost, nous allons donc nous adapter.
Aucune compagnie européenne low-cost ne peut être présente partout. Nous oui, à partir de notre base de Tunis. Les possibilités de développement sont donc nombreuses notamment sur les villes de province européennes. Nous voulons ouvrir Milan, Naples, Bologne, mais les accords actuels ne nous permettent pas de la faire. Avec l'open sky, nous pourrons.
En Europe, il n'y aura bientôt que deux à trois compagnies et quelques low-cost. Donc pour survivre, il faudra de la valeur ajoutée. D'où l'arrivée de notre classe business [ndlr : Privilège] sur Marseille, Lyon et Nice, et la volonté de proposer quelques sièges business aussi sur nos vols charters. Nous étions à contre-courant en étant complètement absents de ce créneau.
Le service nous apporte un plus par rapport au low-cost. Le combat va se faire aussi sur les tarifs et nous l'avons déjà préparé en proposant des allers simples. Tunisair est prête à cette démarche sur le plan tarifaire.
Nabil Chettaoui : Nous n'y avons jamais pensé. D'abord à cause de la taille de notre entreprise. Et de toute façon, créer une low-cost à partir d'une compagnie traditionnelle serait un fiasco. Une low-cost c'est une mentalité avant d'être un concept économique. Tant que je serai ici, il n'y aura pas de low-cost chez Tunisair.
Par contre, il existe beaucoup de projets de low-cost en Tunisie, notamment à partir de Djerba où beaucoup d'européens achètent des résidences. Je pense qu'il y a la place pour une compagnie avec quatre à cinq avions.
Econostrum.info : Vous pourriez donc apporter votre aide à cette création ?
Nabil Chettaoui : Rien n'est impossible mais à l'heure actuelle, je peux vous dire que nous ne participerons pas à la création d'une low-cost !
"Pas de privatisation à court terme"
Econostrum.info : Quelle est votre structure capitalistique ? Envisagez-vous de devenir une compagnie privée ?
Nabil Chettaoui : Tunisair est détenue à 75% par l'Etat tunisien directement ou indirectement, 20% sont en bourse et 5% historiquement à Air France. Il n'y aura pas de privatisation à court terme, peut-être à moyen terme et sûrement à long terme.
L'Etat pénalise nos prises de décision
car nous devons respecter beaucoup de formalisme. L'avantage d'être
propriété de l'Etat est avant tout psychologique.
Econostrum.info : Le nouvel aéroport d'Enfidha sera bientôt livré, quel trafic allez-vous y implanter ?
Nabil Chettaoui : Il ouvrira en octobre 2009 et au départ, il n'y aura que du trafic charter.
Econostrum.info : Vous vous intéressez à la Mauritanie ?
Nabil Chettaoui : Oui, mais nous n'en sommes qu'au début avec cinq vols entre la Mauritanie et Tunis par semaine avec Mauritania Airways. Nous pourrions nous servir de Nouakchott comme hub pour nous éclater sur Dubaï, Djeddah, Marseille et Nice.
Econostrum.info : Des rumeurs ont fait état de votre intérêt pour le dossier Air Sénégal International qui est en voie de règlement. Qu'en est-t-il vraiment ?
Nabil Chettaoui : Nous démentons avoir regardé ce dossier. Il est très difficile de faire des affaires avec un Etat.
Source : Econostrum
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